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Histoire & sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Dreyfus-Vichy
Simon  Epstein   Les Dreyfusards sous l’Occupation
Albin Michel 2001 /  3.1 € -  20.31 ffr. / 358 pages
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Les livres d’histoire sont aussi variés que ce que l’on attend d’eux : il y a de simples récits, certains dans lesquels l’analyse l’emporte, d’autres encore où la place est occupée par des constructions théoriques. Parmi ces ouvrages, certains confirment des connaissances antérieures, d’autres les modifient insensiblement. Il en est enfin qui remettent profondément en question les analyses traditionnelles.

Le livre de Simon Epstein relève de cette dernière catégorie, dans un genre particulièrement iconoclaste. L’auteur, chercheur à l’Université hébraïque de Jérusalem, appartient à une lignée historique israélienne qui remet fortement en cause les cadres d’analyse classique de l’histoire politique et intellectuelle française contemporaine. On peut aisément rapprocher l’idée centrale des Dreyfusards sous l’Occupation de la brillante trilogie que Zeev Sternhell a consacré à la France. Indéniablement, Epstein est à l’histoire de la gauche ce que Sternhell est à celle de la droite. Là où Sternhell bouleversait profondément l’analyse des droites françaises en montrant qu’il avait existé avant 1914 une « droite révolutionnaire » jusqu’alors inconnue (« masquée » dirait-il plus volontiers), Epstein s’est attaché à montrer que la vision traditionnelle de la gauche française, dreyfusarde et résistante, est fausse. En montrant qu’il a existé un fascisme français et que des républicains soutinrent le régime de Vichy (voire le nouvel ordre européen dessiné par l’Allemagne), les deux historiens s’attaquent par des biais différents à une même idée : la prégnance dans les esprits de la culture démocratique républicaine.

L’auteur a raison d’observer que ce qu’il appelle « la théorie des deux France », fondée sur l’idée implicite que les dreyfusards devinrent résistants sous l’Occupation et que les antidreyfusards rejoignirent le camp opposé, paraît peu valide dans de nombreux cas. Epstein s’attaque ainsi à l’idée, commode en histoire et trop souvent utilisée, de la continuité. Le livre, à l’image du style de l’auteur, volontiers ironique et humoristique, est fondé sur une succession de portraits individuels. Là où l’ouvrage prend tout son intérêt, c’est qu’il se penche sur des personnages secondaires, délaissant les grandes figures trop (et souvent assez mal) connues. L’auteur montre, à partir de l’étude de plusieurs dizaines d’itinéraires, parfois s’enchevêtrant, que nombreux furent les dreyfusards – libéraux, socialistes, anarchistes – à entrer dans les rangs pétainistes ou collaborationnistes. A contrario, certains antidreyfusards devinrent d’authentiques résistants. L’auteur taille ainsi en pièces une certaine histoire sainte de l’Affaire Dreyfus, centrée sur les grandes figures (Bernard Lazare, Jaurès, Clemenceau…) et rattachée à la légende dorée de la gauche radicale et socialiste. Epstein avance une explication : le poids du pacifisme et de l’antimilitarisme chez de nombreux dreyfusards, éléments déjà connus et analysés, pour expliquer les passages du dreyfusisme au pétainisme. De même, il insiste, ce qui n’est pas vraiment neuf non plus, sur l’ampleur de l’antisémitisme d’une part importante de l’extrême-gauche. Ces aspects sont justes et incontestables. On observera toutefois qu’ils ne s’appliquent pas à tous les cas individuels évoqués par l’auteur : il est bien des personnages pour lesquels l’auteur constate une évolution qu’il ne peut expliquer. Il en va ainsi de certains philosémites qui deviendront antisémites. Peut-être l’explication réside-t-elle dans des circonstances personnelles que l’historien ne peut appréhender par le biais des concepts politiques que sont le pacifisme et l’antimilitarisme. Il y a, en fin de compte, une grande part « d’indéterminisme » comme le confesse l’auteur. Il s’agit là d’un point central dans ce livre important. En effet, existe-t-il une clef générale d’interprétation pour expliquer ces itinéraires curieux dont on ne peut contester la réalité ? Le livre semble plutôt apporter une réponse positive mais sans trancher absolument.

On pourrait bien sûr reprocher à l’auteur quelques inexactitudes sur certains personnages évoqués, mais ceci ne remettrait pas en cause la réalité des itinéraires exhumés du passé. En revanche, l’on s’étonnera de voir dans la bibliographie presque uniquement des sources imprimées. Les sources primaires que constituent les correspondances et les diaries, dont il est montré depuis près de vingt ans que ce sont des sources fondamentales pour l’histoire politique et intellectuelle de l’époque, ne sont jamais citées. Quant à la bibliographie scientifique, elle est aussi assez maigre. L’auteur a-t-il pensé que les travaux réalisés en France étaient prisonniers de la « théorie des deux France » ? On aurait aimé qu’il éclaire ce choix dans le dernier chapitre. Il n’en demeure pas moins qu’il signe un livre stimulant et courageux dont l’objet n’est pas tant de refaire l’histoire des dreyfusards que de s’interroger, à la suite de Gérard Noiriel et dans un genre en vogue, sur les « racines républicaines de Vichy ». Souhaitons à Simon Epstein de nombreux lecteurs - en tout cas plus que les « quatre collègues et sept étudiants » qu'il évoque au début de son ouvrage...


Sébastien Laurent
( Mis en ligne le 02/01/2002 )
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