René Bousquet
2001 / 4.58 € - 30 ffr. / 638 pages
ISBN : 2213610479
Préface de Pierre Laborie
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Parue dans sa version originale en 1994, la biographie de René Bousquet revient dans les librairies, revue et augmentée. Sept ans après, une lecture plus sereine en est possible si l’on veut bien se rappeler la réception de cet ouvrage presque exclusivement jugé à l’aune des rapports entre Mitterrand et Bousquet, sujet alors particulièrement convoité et sur lequel il est superfétatoire de revenir.
Pourtant, on a bien affaire à la relation exhaustive de la vie d’un homme au parcours aussi contradictoire qu’insaisissable. Né en 1909, cet enfant de Montauban suce très tôt le lait radical-socialiste. Fils d’un notaire lié à Irénée Bonnafous et aux frères Sarraut, il se marie jeune et s’inscrit à la faculté de droit. Par relations, il devient à vingt ans chef de cabinet du préfet du Tarn-et-Garonne. L’année suivante, en 1930, les circonstances dramatiques de la crue du Tarn révèlent l’héroïsme de ce jeune républicain qui n’hésita pas à mettre en péril sa propre vie pour en sauver d’autres.
Distingué par cet exploit - il reçoit les honneurs de La Dépêche et est décoré de la Légion d’honneur -, il connaît alors une succession de brillants avancements : membre du cabinet du sous-secrétaire à la présidence du Conseil et à l’Intérieur la même année, chef adjoint de Cathala, son véritable Pygmalion, nommé à ce même poste l’année suivante, qu’il suivra par la suite dans ses différentes fonctions, sous-préfet hors cadres en 1935, affecté au département de la Marne en 1938.
La défaite de la France et la naissance du régime de Vichy propulsent Bousquet à la tête de la préfecture de ce même département en 1940 avant de devenir, l’année suivante, préfet de région de Champagne. À l’occasion du retour de Laval, en avril 1942, il est nommé secrétaire général à la Police, véritable organe central de la répression tous azimuts. Jusqu’à son renvoi à l’instigation des Allemands en décembre 1943, il se comporta en véritable exécutant de la politique d’exclusion, d’arrestations, de rafles - dont celle du vel’ d’hiv’ - et de déportations dans les deux zones, avec quel scrupule et souvent avec quel zèle. Pataugeant à son aise dans la tourbe de la collaboration d’État, il dialogue sans difficulté ni remords avec les autorités d’occupation, va parfois même au devant de leurs attentes.
S’il est l’objet d’une procédure judiciaire à la Libération, il est condamné par la Haute Cour de justice en 1949 à une peine dérisoire - l’indignité nationale - qui, de reste, fut rapportée, essentiellement à raison de sa défense : il a agi en qualité de fonctionnaire et était, de ce fait, irresponsable politiquement. Plus exécutant qu’inspirateur ou décideur, il servit l’État français face à l’ennemi. Il argua de sa disgrâce en décembre 1943 pour suggérer un quelconque double jeu.
Son paisible après-guerre fut partagé entre le journalisme - à La Dépêche du Midi - et la carrière bancaire - la Banque d’Indochine devenue Indosuez en 1975. On connaît la suite. Le vieil homme qui se croyait à l’abri de toute poursuite fut rattrapé par son passé et mis en examen en 1991 pour crimes contre l’humanité. Son assassinat, deux années plus tard, entraîna l’extinction des poursuites, privant les familles de ses victimes comme l’opinion d’un procès autant que d’un nécessaire exercice de compréhension et de mémoire. À cet égard, le livre de Pascale Froment, rigoureux et fouillé, est précieux : il apporte une grande partie de la réponse à tous les problèmes que soulèvent Bousquet et, plus généralement, le régime de Vichy.
Jérôme Cotillon
( Mis en ligne le 09/07/2002 )
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