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Dans la Grèce d'Hitler (1941-1944)
Mark  Mazower   Dans la Grèce d'Hitler (1941-1944)
Les Belles Lettres 2002 /  5.04 € -  33 ffr.
ISBN : 2-251-38051-5
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Depuis quelques années, les éditions Les Belles Lettres proposent au public des traductions d'ouvrages anglo-saxons qui ont renouvelé les perspectives de recherche de l'histoire de la seconde guerre mondiale. Après la parution des livres de Christopher Browning, Des hommes ordinaires ; le 101ème bataillon de réserve de la Police allemande et la solution finale en Pologne (1994), Politique nazie, travailleurs juifs, bourreaux allemands (2002), et l'ouvrage de R. Proctor, La guerre des nazis contre le cancer (2001), cet éditeur publie l'ouvrage de Mark Mazower, paru outre-atlantique en 1993, Dans la Grèce d'Hitler (1941-1944).

Les Belles Lettres présente cet ouvrage comme étant l'équivalent pour l'histoire de la Grèce sous l'occupation du livre de Robert Paxton sur la France de Vichy, il y près de trente ans. Par delà l'inévitable effet d'annonce publicitaire, force est de constater le caractère fondamental du travail de Mr Mazower tant pour l'histoire de la Grèce que pour l'étude du nazisme. Toutefois, la perspective de Mark Mazower n'est pas celle de Robert Paxton. A partir d'un dépouillement systématique des Archives nationales Grecques et du Bundesarchiv allemand, l’auteur démontre de manière concise à la fois le caractère fantoche du mouvement collaborationniste en Grèce, resituée de manière précise dans l'héritage de la dictature de Metaxas avant-guerre, et sa quasi absence d'enjeu pour l'occupant nazi. En outre, il éclaire de manière judicieuse l'absence totale de soutien rencontré par le gouvernement collaborationniste auprès de la population, et au contraire l’adhésion très précoce des grecs aux différents mouvement de Résistance.

Mazower donne ainsi quelques clés d'analyse d'une situation fort différente de celle de la France : selon lui, c'est l'évolution de la répression (directe) nazie envers les populations grecques et les partisans qui caractérise l'occupation allemande en Grèce. L'élément nouveau, fourni par l’auteur, tient dans la révélation que la campagne grecque, non prévue à l’origine par l'Etat-major allemand et par Hitler, s'inscrit dans le contexte idéologique nazi de guerre totale à l'est, dans le cadre de la préparation de Barbarossa : comme ce sera le cas en URSS à partir de juin 1941, il n'est prévu aucune logistique concernant l'alimentation de la Wehrmacht, les ordres étant de vivre sur le pays, en réquisitionnant tout bien de consommation, sans considération aucune pour des populations qui pourtant ne sont pas, dans l'idéologie nazie, placées à un niveau racial aussi bas que les slaves. S’ensuivra en 1941 et 1942 une terrible famine, phénomène unique dans l'histoire des pays occupés par l'Allemagne nazie. A partir de données statistiques fiables, et par le recoupement de sources incontestables (rapport de la Wehrmacht et de la délégation diplomatique allemande à Athènes), l'auteur avance le chiffre minimal de 300 000 personnes directement mortes de faim ou de dénutrition en moins de 12 mois. Il faut noter que durant cette période, la Grèce n'est pas gérée par les SS, mais bien par une administration militaire allemande relativement philhellène, considérant la Grèce comme le berceau de la civilisation occidentale, et les grecs comme des combattants militaires plus valeureux que les troupes italiennes.

Ainsi, le travail de Mark Mazower s'inscrit complètement dans le renouveau des perspectives historiques concernant la pénétration de l'idéologie nazie dans la Wehrmacht, et de sa participation massive aux crimes contre l'humanité décidés par la SS. En ce sens, cet ouvrage est plus à rapprocher des livres d'Omer Bartov sur la Wehrmacht (L'Armée d'Hitler, la Wehrmacht, les nazis et la guerre) et surtout de Christian Gerlach (dont l’ouvrage sur l’utilisation de la famine lors de la campagne de Russie n’est toujours pas traduit en français). Mazower démontre en effet que la position philhellène de l'armée fait rapidement place à une attitude raciale méprisante, avec le développement des actes de résistance, induisant la nécessité d'assurer une protection de plus en plus grande des troupes d'occupation, ainsi que le pillage des biens grecs, accru encore après la défaite de Stalingrad et la mobilisation de l'économie nazie dans le cadre de la guerre totale.

Les militaires mettent en place une politique de répression systématique qui sera reprise en 1943 par la SS, véritable maître du pays à partir de ce moment là. Les SS ne feront alors que pousser à l'extrême une guerre idéologique contre le "judéo-bolchevisme" mise en place par les militaires. Conséquence dramatique de ce tournant, la déportation des communautés juives de Grèce, en particuliers celles de Salonique et de Rhodes, parmi les plus anciennes de la Méditerranée, déportation orchestrée au pas de charge par le sinistre Aloïs Brünner, terriblement efficace au milieu d'une population grecque pourtant philo sémite. Notons aussi que la guerre contre les partisans grecs sera menée par les nazis avec la même sauvagerie qu'en Serbie contre les partisans Yougoslaves et sera dirigée un temps par le tristement célèbre Jürgen Stroop, le boucher du Ghetto de Varsovie.

Dernière particularité dans cette remarquable synthèse magnifiquement documentée, Mazower explique d'une manière très fine le développement des rapports internes à la Résistance entre communistes ultra-majoritaires jusqu'à 1944, et nationalistes. Quoique critique envers la volonté d'hégémonie du PC grec, Mazower montre que celui-ci était alors incontestablement rejoint et suivi par une proportion sans cesse croissante de la population grecque. Montrant l'hostilité profonde de Churchill à l'égard des partisans communistes, l'auteur développe de manière anticipée, tous les déterminants qui seront cause de la guerre civile qui suivra la fin de l'occupation, guerre civile qui se manifeste selon lui comme un règlement définitif de la situation politique d'avant guerre. On est de ce fait en droit de regretter que cet auteur n'ait pas poursuivi son travail jusqu'à la fin de la guerre civile, seule véritable critique que l'on pourrait faire à cet ouvrage.

A noter enfin que les Belles Lettres ont choisi de publier l'ouvrage en l'état, c'est à dire avec la très riche (et inédite) iconographie présentée par l'édition en langue anglaise. En somme, cet ouvrage constitue un des livres majeurs dans l'historiographie du nazisme et de la seconde guerre paru ces dernières années.


Philippe Mezzasalma
( Mis en ligne le 01/04/2003 )
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