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Histoire & sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Deux regards sur notre siècle
René  Rémond   Regard sur le siècle
Sciences po - La bibliothèque du citoyen 2000 /  1.75 € -  11.45 ffr. / 113 pages
ISBN : 2-7246-0780-5
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La fin du XXe siècle appelle les bilans. Du côté de Clio, deux grands historiens se sont prêtés à l'exercice. Eric Hobsbawm et René Rémond, proposent avec des styles, des approches et des conclusions différentes, deux regards sur notre siècle. Si l'historien anglais de tendance marxiste dresse un diagnostic pessimiste sur cette période, l'auteur des Droites en France, fait pencher quant à lui la balance du côté positif.

Les deux historiens s'accordent toutefois sur le découpage chronologique du siècle. Construction artificielle par excellence - quoique la dimension psychologique relative au périodes et chiffres ronds ne doive pas être ignorée - notre siècle, humain, historique, ne saurait être délimité avec pertinence du 1er janvier 1901 au 31 décembre 2000. Un siècle n'existe que par ce qu'en font les hommes et par la cohérence qui s'en dégage. Comme la Guerre de Cent Ans ou les Trente Glorieuses, le XXe siècle fut moins long que son nom ne l'indique. René Rémond adhère au découpage déjà proposé en 1994 par Hobsbawm : notre siècle fut la courte période de 75 ans qui sépara l'attentat de Sarajevo de la chute du mur de Berlin, de la Première Guerre Mondiale ou vînt mourir la grande Europe du XIXe siècle à l'effondrement du communisme. On peut dire, en reprenant ici les conclusions de François Furet (Le Passé d'une Illusion, Calmann-Lévy, 1995), que la Première Guerre Mondiale fut le détonateur d'un siècle dont le communisme fut la matrice.

A l'intérieur de ce court XXe siècle, les deux historiens s'accordent également pour distinguer trois périodes. Au temps infernal des deux guerres mondiales, des totalitarismes et de la Shoah succéda un âge d'or, celui des Trente Glorieuses analysées par Fourastié, période de croissance économique, d'innovations et d'amélioration des conditions de vie que jamais jusque-là, l'humanité n'avait connues.

Les deux historiens s'accordent également sur les bouleversements engendrés par ce siècle. Si un terme doit le résumer, c'est bien celui de changement. La population mondiale a explosé en cent ans à une cadence inédite; les découvertes technologiques et scientifiques, les progrès de la médecine, de l'hygiène ont prolongé la vie humaine plus qu'en aucune autre période de notre histoire. Mais ce siècle fut aussi celui des guerres mondiales et totales, de la barbarie; il fut le siècle de la Shoah, l'âge des extrêmes pour reprendre Hobsbawm, celui qui connut une impressionnante accélération de l'histoire, remarque René Rémond en reprenant le titre d'un essai écrit en 1948 par Daniel Halévy, critique, essayiste et historien.

C'est sur la période la plus contemporaine que les deux auteurs divergent. Pour l'historien anglais, ce siècle finit mal, quand pour l'académicien, président de la Fédération Nationale des Sciences Politiques, il porte en lui les promesses de lendemains chantants.

A partir du choc pétrolier de 1973, révélateur des dysfonctionnements d'un capitalisme incontrôlé, le monde s'enfonce dans une déroute dont profitent les États riches, l'Occident, au détriment d'un monde majoritairement en désarroi menacé par les pires dangers écologiques, démographiques, politiques et géopolitiques. L'ultralibéralisme ambiant, qui ouvre le XXIe siècle, doit inquiéter; et la situation ne s'arrange pas, comme les violentes crises des dernières années en Asie, Amérique latine et Russie l'ont montré. Ce point de vue, inquiet plus qu'alarmiste cependant, est celui d'Eric Hobsbawm.

René Rémond est plus optimiste. S'il est incontestable que notre siècle porta l'horreur à des sommets, l'historien s'autorise une nuance. Si le premier XXe siècle est incontestablement marqué par la Shoah, sa seconde moitié est celle d'un renouveau, d'un redressement qui permet tous les espoirs pour les années à venir. Depuis 50 ans, en effet, notre monde est un monde relativement pacifié, régi par un ordre international toujours plus solide et efficace, certes pas encore parfait; les progrès de la démocratie, en Europe méditerranéenne dans les années 70, en Amérique latine dans les années 80 et en Europe centrale et orientale depuis dix ans, ont de quoi susciter l'optimisme. Les avancées de la construction européenne, sans éviter les avatars, sont réelles et posent le vieux continent en modèle pour l'intégration économique d'abord, et peut-être politique vis-à-vis d'autres régions du monde. La mise en place d'un Tribunal pénal international et la chasse aux sorcières que légitiment les affres récents du pinochétisme, tout cela est enthousiasmant pour l'auteur. Sans dire ironiquement comme Aldous Huxley que nous vivons dans le meilleur des mondes, René Rémond, en historien, propose un diagnostic favorable de notre monde actuel.

Il convient de remarquer le discours résolument historien des deux hommes. L'un comme l'autre ne se posent ni en prophète, ni en redresseur des torts, encore moins en inquisiteur. L'historien sait que l'histoire est mouvante et incertaine, que toute schématisation la trahit, qu'aucune loi fondamentale ne l'anime, et qu'il doit donc l'étudier avec objectivité et humilité. Fait révélateur, les deux hommes se démarquent des analyses de politologues comme Samuel Huntington et Francis Fukuyama, essayistes américains qui ont joué aux Cassandres au début des années 1990, le premier par l'annonce catastrophiste de "Chocs de Civilisations" pour le siècle à venir, le second par le constat euphorique d'une victoire absolue de la démocratie et du marché sur notre planète annonçant la Fin de l'histoire. Il peut paraître injuste de la part de René Rémond de critiquer le marxisme de l'historien anglais dont l'ouvrage vaut bien le sien. En effet, les deux discours sont acceptables et, dans le cas de Hobsbawm, c'est moins le marxisme que l'inquiétude vis à vis de l'ultralibéralisme qui guide sa réflexion.

Parce qu'un siècle est par définition un artefact et parce qu'il fut le siècle de dizaines de milliards d'individus qui le vécurent selon des paramètres forcément différents, le bilan est forcément partiel et incomplet, biaisé par le regard et l'histoire de celui qui se propose de l'examiner. Les deux ouvrages d'Eric Hobsbawm et de René Rémond sont deux lectures qui proposent des éléments pour que chacun forge sa propre opinion. C'est l'objectif affiché de la collection "La bibliothèque du citoyen" proposée par les Presses de Sciences-Po, où René Rémond a publié son essai. On appréciera tout particulièrement son talent pour la synthèse qu'il illustre ici à nouveau. Quant à l'ouvrage d'Eric Hobsbawm, il mérite la lecture qu'un jugement hâtif de certaines élites françaises a voulu empêcher. Il n'est pas très glorieux pour l'Hexagone d'avoir fermé ses portes à l'un des penseurs les plus stimulants de la scène internationale.


Thomas Roman
( Mis en ligne le 04/05/2000 )
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