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Edith Stein. Une femme dans le siècle
Andreas  Uwe Müller   Maria Amata  Meyer   Edith Stein. Une femme dans le siècle
JC Lattès 2002 /  2.98 € -  19.50 ffr. / 276 pages
ISBN : 2-7096-2080-4
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Parler d’Edith Stein n'est pas chose aisée. Morte à Auschwitz en 1942, canonisée à Rome en 1998, elle compte parmi les plus belles figures féminines du vingtième siècle et il faudrait être soi même touché par la grâce pour rendre de façon adéquate ce qu’une telle existence a d’admirable et de mystérieux. L'essentiel de sa vie se laisse partager en deux périodes : un engagement remarqué dans la vie active, puis le cloître, d’où elle ne devait sortir que pour aller mourir en déportation.

Edith Stein a participé de très près à la vie philosophique allemande à l’époque de la République de Weimar. Assistante de Husserl à Fribourg de 1916 à 1918, tâche dans laquelle elle sera remplacée par Heidegger, elle appartenait au cercle des intimes du Maître, où elle a côtoyé des personnalités connues, comme Max Scheler ou Alexandre Koyré, et d’autres moins connues, comme Hans Lipps, Roman Ingarden, Hedwige Conrad Martius ou Adolf Reinach, autre assistant de Husserl mort sur le front en 1917. Comme beaucoup d’entre eux, elle n’a jamais vraiment opéré le tournant transcendantal. Elle avait découvert la phénoménologie dans les Recherches Logiques, où elle appréciait avant tout la critique du relativisme et la “méthode objective de travail”. Dans l’ouvrage de 1900, elle avait cru reconnaître une “nouvelle scolastique” et il n’est donc pas surprenant qu’elle ait pu passer sans difficulté de Husserl à Saint Thomas.

K. Lowith (Ma vie en Allemagne avant et après 1933, Hachette, 1988) et H. G. Gadamer (Années d'apprentissage philosophique, Criterion, 1992) nous ont laissé des descriptions extrêmement vivantes de cette période brillante entre toutes de l’Université allemande, mais ce sont des témoignages masculins. Pour occuper la position qui fut la sienne, Edith Stein a dû se battre et l’ouvrage relate par le menu les difficultés qu’elle rencontra pour avoir le droit de présenter une habilitation. Aujourd’hui cette forme de féminisme nous apparaît bien timorée, mais peut-être est-elle plus proche de la vérité que beaucoup des formes qui l’ont suivie.

Née en 1891 à Breslau (aujourd’hui Wrocklaw), dans une famille juive de onze enfants, dont quatre moururent en bas âge et quatre en camps de concentration, baptisée le 1er janvier 1922 , entrée au Carmel de Cologne le 14 octobre 1933, Edith Stein avait fui l’Allemagne, peu après la nuit de Cristal, pour se réfugier avec sa soeur Rose en Hollande, au Carmel d’Echt. L’ouvrage retrace leur exode puis leur déportation à Auschwitz, où celle qui était alors Soeur Bénédicte de la Croix est morte le jour même de son arrivée, le 9 août 1942. «Viens, nous partons pour notre peuple» : telles sont les dernières paroles que nous connaissions d’elle, au moment où la Gestapo vint arrêter les deux soeurs. Peuple juif ? certainement. Peuple allemand ? c'est possible, car elle refusait de dissocier et, même après son baptême, continuait à se considérer comme une juive allemande.

A quoi bon le cacher ? de son baptême à sa mort, la vie d’Edith Stein est difficile à comprendre pour beaucoup de nos contemporains. Sa décision d’entrer au Carmel, par exemple, peut passer pour un gâchis, comparable à celui de Pascal renonçant aux sciences. C’était en un sens l’avis de son directeur spirituel, qui n’accéda à cette demande déjà ancienne qu’en 1933, au moment où toute activité publique lui devenait interdite. Plus fondamentalement, à l’époque où les églises se vident, c’est sa conversion, — ou plutôt cette vague de conversions, car on pourrait donner bien d’autres exemples — , que nous avons du mal à comprendre. Sa mère, son beau-frère vécurent ce choix comme une défection, presque comme une trahison, «au moment où les juifs souffraient persécution». Avec le recul, nous sommes enclins à ne plus y voir qu’un des effets de l’assimilationisme, autant dire d’un phénomène de société dont on nous dit qu’il est définitivement révolu. Faut-il admettre qu’elle s’est trompée, que son sacrifice a été vain ? Mais de quel droit déclarer notre point de vue supérieur au sien, de quel droit exclure que ce soit nous qui nous trompions ? Le plus honnête est sans doute qu’il y a d’autres façons de voir, de vivre, aussi respectables, sinon plus, que la nôtre, et de nous laisser interpeller par ces êtres d’exception qui ne transigeaient pas avec la vérité.

Parmi les nombreux ouvrages qui retracent la vie d’Edith Stein, celui-ci n’est pas le meilleur et on peut lui préférer par exemple celui qu’Elisabeth de Miribel lui avait consacré, il y a maintenant près de cinquante ans (Edith Stein, Le Seuil, 1954). Est-ce dû à la traduction, qui laisse beaucoup à désirer (la mère d’Édith, Augusta, devient, on ne sait pourquoi, Auguste ...) ? Sans doute pas seulement, mais qu’importe. Nul ne peut rester insensible au rayonnement qui émane de cet être épris d’absolu, de cette sainte, honneur d’Israël et Gloire de l’Église, qui priait pour les victimes et pour leurs bourreaux.


Michel Bourdeau
( Mis en ligne le 29/04/2003 )
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