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Littératureet Romans & Nouvelles  

Les Toutes premières choses
de Hubert Klimko
Belfond 2011 /  15 €- 98.25  ffr. / 132 pages
ISBN : 978-2-7144-4841-5
FORMAT : 14,3cm x 22,6cm

Véronique Patte (Traduction)

Pérégrination européenne

D’Hubert Klimko on avait aimé La Maison de Roza (2009), son premier roman. Depuis a paru La Berceuse du pendu (2010) ; Les Toutes premières choses est son troisième livre chez Belfond. On y retrouve toutes les promesses des précédents. Polonais (né en 1967), Hubert Klimko a vécu une dizaine d’années en Islande. Il raconte ici une pérégrination européenne qui à certains égards fait penser aux errances des étudiants du Moyen Age, d’une université à l’autre.

Un périple initiatique qui ici n’est pas fondé sur le savoir scolastique mais décrit le rude apprentissage de la vie matérielle, un apprentissage loufoque et dérisoire, au fil de rencontres de personnages surprenants, baroques, improbables. On y croise entre autres une mère de famille nombreuse allemande et généreuse à l’égard du jeune auto-stoppeur, un japonais, Hiroshi, qui a quitté son pays muni d’un kimono nuptial et de trois kilos de mangues marinées dans du sel de mer, un irlando-italien, glacier de son état et amoureux de la Pologne. Voyant à ses heures, Hiroshi prédit au narrateur une carrière d’écrivain, puis disparaît plus loin. D’autres lui prédiront une vie longue. Le voyage se poursuit d’est (Autriche, Allemagne) en ouest pour aboutir en Angleterre où notre héros pratique divers métiers : cuisinier, plumeur de dinde, employé dans une serre. De retour en Pologne, il se bat contre l’avarice des éditeurs, la dureté des temps, pour finalement trouver un ancrage heureux à Vienne ; dans une Vienne cosmopolite, à l’heure d’une Europe qui s’élargit dans le cadre de l’espace de Schengen et où une ultime rencontre a nécessairement lieu avec un psychiatre !

Si progressivement le récit s’organise en chapitres qui sont autant de nouvelles, le début, lui, commence dans un gigantesque délire extravagant : le récit de la naissance du héros, ou plutôt les récits puisque plusieurs possibilités sont proposées… Son enfance entre une mère solitaire et un oncle généreux, les souvenirs de ses grands-parents dans une Europe orientale qui n’a pas été épargnée par les malheurs, son amour désespéré pour la belle Ulla qui le conduit à partir sur les routes, après toutefois un passage au séminaire et deux mariages… On pense à Italo Calvino mais aussi a Tristram Shandy dans ce récit picaresque, énorme… Comme certaines peintures flamandes, l’excès est convoqué en permanence pour dire la vie et sa puissance.

En préface, Hubert Klimko avertit son lecteur : «(…) j’ai réussi à écrire un roman autobiographique, court, certes, puisque je n’ai que quarante deux ans. L’histoire de la littérature et la psychologie ont démontré que personne ne réussira jamais à dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité dans une autobiographie.(…) Dans mon livre, j’ai voulu raconter la vérité, rien que la vérité, toute la vérité. Vous ne me croyez pas ? Demandez à mon psychiatre !».

Vérité ou non, peu importe… On ne retient que le grand plaisir éprouvé à lire cette - ces – histoire(s) jubilatoire(s) qui constituent sinon une autobiographie «vraie» du moins une autobiographie littéraire…

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 09/09/2011 )
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