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Littératureet Romans & Nouvelles  

J’aimais mieux quand c’était toi
de Véronique Olmi
Albin Michel 2015 /  15 €- 98.25  ffr. / 134 pages
ISBN : 978-2-226-31247-1
FORMAT : 14,2 cm × 20,5 cm

L'Amour comme au théâtre

Nous découvrons Nelly, une femme de 47 ans, assise sur un banc de la gare de l’Est à Paris, complètement paumée, hagarde mais lucide, incapable de bouger ; son corps ne lui répond plus mais son esprit reste éveillé... Elle se souvient des dernières 24 heures qui l’ont faite basculer du train-train quotidien, dans lequel chacun de nous se rassure, vers le chaos. Sa mémoire est vive, son cerveau retrace toutes les étapes de ces dernières heures mais son corps reste immobile.

Le cerveau en ébullition, Nelly nous relate sa passion pour le théâtre, son rythme de vie, son univers bien contrôlé, par peur de se perdre. Tous les soirs, le même rituel. Elle joue au théâtre une pièce de Pirandello, Six personnages en quête d’auteur. Mais voilà que tout bascule quand, ce soir-là, elle aperçoit, au cinquième rang, l’homme qu’elle aimait et qui l’a quittée quelques mois plus tôt. Elle est incapable de poursuivre son texte...

Pour chaque représentation, elle reprenait son rôle avec minutie et régularité. Au théâtre comme en amour, l’auteur nous fait comprendre que l’engagement est total, que rien n’est acquis. Tout est remis en cause chaque soir. Comme en amour, chaque représentation est unique. On assiste à ce parallèle entre la présence sur scène et la présence de l’être aimé dans la salle qui fait ressurgir des souvenirs et des sentiments refoulés.

Pendant des mois elle a cru l’avoir oublié. Mais tout resurgit comme un grand coup de poing avec une violence qui la paralyse et l’empêche de rentrer chez elle. La douleur est là, encore plus vive qu’avant. Physiquement, elle ne contrôle plus rien, comme si toutes ses fonctions vitales l’abandonnaient. Alors elle s’assoit sur ce banc, gare de l’Est. Tout se bouscule : la pièce jouée se mélange avec le drame vécu.

On écoute alors une longue plainte, un râle, une agonie qui nous interpellent : va-t-on succomber aussi à cette mélancolie et s’asseoir avec Nelly sur ce banc ? Bercé par la rumeur de la ville au loin, comme si la vie s’éloignait… happé par les mots de Véronique Olmi qui nous font entrevoir les coulisses du jeu théâtral et les tribulations des acteurs. Ou bien sommes nous incapables de compatir à ce deuil d’un amour perdu et impossible ?

On sait que l’amour peut faire souffrir mais le désir de vivre est plus fort que les risques encourus par une passion. Cette errance dans Paris nous révèle à quel point l’amour est à la fois une menace mais vaut la peine d’être vécu : juste pour vivre… même si c’est parfois douloureux.

Frédérique de Craene
( Mis en ligne le 18/03/2015 )
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