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Littératureet Romans & Nouvelles  

Le Fils du capitaine
de Nedim Gürsel
Seuil - Cadre vert 2016 /  21 €- 137.55  ffr. / 265 pages
ISBN : 978-2-02-122563-1
FORMAT : 14,0 cm × 20,5 cm

Jean Descat (Traducteur)

Istanbul, l’incomparable

Nedim Gursel (né en 1951) est un des grands écrivains turcs contemporains même s’il a la nationalité française depuis 1984 et vit à Paris où il est directeur de recherches au CNRS, ayant dû fuir la Turquie pour des raisons politiques. Son oeuvre romanesque est importante et récompensée par de nombreux prix littéraires ; il est également l’auteur de récits de voyage et d’essais. S’il écrit ces derniers en français, en revanche c’est le turc qu’il utilise pour ses romans.

Le Fils du capitaine reprend un peu tous les fils de cette vie riche avec ce roman qui n’est pas une autobiographie mais qui évoque les lieux chers à l’auteur et surtout Istanbul la belle, l’incomparable. C’est en contemplant sa ville à ses pieds que le narrateur, sur une suggestion de sa fille, raconte sa vie en l’enregistrant sur un vieux magnétophone à bande. Une vie qui commence en Anatolie avant de se poursuivre par l’internat au lycée Galateseray, le grand lycée français d’Istanbul, et de parcourir le monde en reporter, avec un arrêt à Nantes auprès de son épouse française. En arrière-plan, évoquée par bribes, l’histoire politique de la Turquie depuis les années 1960 jusqu’au pouvoir de «la moustache en amande».

De sa longue vie, le narrateur conte essentiellement les années de jeunesse, le reste n’est que brèves allusions. Orphelin à six ans, il semble dans un premier temps ne pas réaliser la mort de sa mère, mais garde sur lui toute sa vie la petite photo de la tête maternelle découpée sur la photo de mariage de ses parents. Lui, il est le «fils du capitaine», élevé entre sa grand-mère venue de Roumélie et son père pingre, sévère, qui s’enivre le soir avec ses trois amis. Ce père qui participe activement au coup d’état militaire du 27 mai 1960, et à la répression qui s’ensuit, ce père à l’enterrement duquel le héros ne se rendra pas. Père omniprésent dans les souvenirs du fils, associé à une Turquie traditionnelle dans laquelle les hommes mangent des mezzé en buvant du raki, en écoutant des musiciens jouer des airs nostalgiques, des chansons d’amour.

Une adolescence des années 1960, entre garçons, de longues errances dans Istanbul, la première véritable histoire d’amour sur fond de drame politique. «L’Istanbul de mon enfance tient en quelques photos en noir et blanc fanées». Quelques photos en noir et blanc sans doute, mais Nedim Gursel les retranscrit en couleurs, et à le lire on entend les mille bruits de la ville, les odeurs, la chaleur, la vitalité ardente d’Istanbul.

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 08/04/2016 )
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