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Littératureet Romans & Nouvelles  

Le Grand leader doit venir nous voir
de Velina Minkoff
Actes Sud 2018 /  22 €- 144.1  ffr. / 286 pages
ISBN : 978-2-330-10421-4
FORMAT : 11,6 cm × 21,7 cm

Candide à Pyongyang

Velina Minkoff, à travers ce premier roman traduit de l'anglais, nous fait découvrir une page historique et politique de la Corée du Nord et de l'ensemble du monde communiste, vue par une adolescente Bulgare envoyée par son pays dans un camps international de pionniers socialistes, avec cinq autres compatriotes.

"Il y avait beaucoup de camps comme ça, en Hongrie, en RDA, en Tchécoslovaquie, en France, à Cuba, en URSS..." Alexandra prend sa mission de reporter très au sérieux, tant pour relater son voyage que pour représenter au mieux son pays. Mais c'est une adolescente de treize ans, certes bonne militante mais plus préoccupée par des expériences capillaires ou par la rencontre avec des garçons que par cet hypothétique "grand leader" qui doit venir les voir.

L'auteure a cependant su bien transcrire avec des mots et des pensées fraîches l'émerveillement de sa jeune héroïne et son insouciance par rapport à une conscience politique. Nous sommes en 1989, l'histoire est en marche pour une nouvelle écriture mais Alexandra, élevée au sein d'un socialisme plus protecteur que totalitaire, rêve à l'union des peuples détenteurs de la vérité humaine et s'investit dans les hymnes, les danses, les représentations, avec une ferveur exemplaire, voire exagérée.

C'est un été au bord de la mer, certes avec des maillots de bain uniformes, rouge pour les filles, noirs pour les garçons, mais avec la même frivolité qu'à Marbella ou à Juan les Pins. C'est ce décalage, la fraîcheur légère de l'écriture qui changent les a priori du lecteur sur la chape de plomb qui pouvait régner sur ces républiques soviétiques ou plus largement sur la vision d'un communisme austère.

A son retour à Sofia début septembre, les choses changent peu à peu et le 10 novembre Jivkov démissionne. "Il n'y a plus de communisme en Bulgarie". La postface du traducteur, Patrick Maurus, éclaire le lecteur sur l'intention de Velina Minkoff : "fondée sur l'expérience personnelle de l'auteure, il y a une trentaine d'années, la description de la Corée du Nord, j'en atteste, est étonnante de vérité, de légèreté et d'humour, et surtout, grâce à ce regard enfantin, libérée des jugements de valeur que nous infligent tant de discours illégitimes".

Paru en mai de cette année, le roman fait un étrange écho à la rencontre entre Trump et Kim Jong-Un. Hasard ou volonté ?

Raymonde Roman
( Mis en ligne le 27/07/2018 )
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