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Littératureet Romans & Nouvelles  

Les Héritages
de Gabrielle Wittkop
Christian Bourgois 2020 /  17 €- 111.35  ffr. / 169 pages
ISBN : 978-2-267-03209-3
FORMAT : 12,0 cm × 20,0 cm

Biographie d’une maison

A l’occasion du centenaire de la naissance de Gabrielle Wittkop (1920-2002), née Ménardeau, les éditions Christian Bourgois publient ce petit roman inédit, portrait grinçant et dérangeant des habitants d’une maison, entre sa construction en 1895 et sa destruction en 1995, un siècle de vies plus ou moins heureuses, parallèles à un siècle d’Histoire.

Gabrielle Wittkop joue avec les mots – qu'elle choisit cinglants - dans un style incisif et une langue inspirée de Sade et Bataille. Ce récit révèle ainsi une littérature dérangeante, un brin cruelle, macabre et étrange, au-delà de toute morale, aux centres d’intérêt morbides : la mort, le sexe… Wittkop forma un couple intellectuel particulier avec son mari, historien allemand, déserteur pendant l’occupation de Paris. Toutes ces singularités apparaissent dans Les Héritages, bien qu’atténuées par la fiction. Elle et son mari se suicideront, chacun à son tour, malades.

La villa est construite sur un terrain en pente dont la prairie descend vers la rive nord de la Marne. «Toute belle en pierre de taille et de style néo-classique, elle avait un péristyle, un chapeau d’ardoise et des cheminées en brique rose marquées de fer noir». Son premier propriétaire, Célestin Mercier, la baptise «Séléné», la déesse de la lune dans la mythologie grecque. Floué par son homme de confiance, ruiné, Monsieur Mercier se suicide dans les combles. Le sac de moleskine ayant abrité la corde du pendu reviendra hanter régulièrement les prochains habitants de la villa. Lui succèdent un bibliophile amateur de roulette russe, qui mourra à petit feu, empoisonné par sa domestique, un inspecteur d’origine corse, des émigrés juifs emmenés au Vel’ d’hiv’ le 16 juillet 1942, un jeune fossoyeur, un déserteur allemand et son amour Antoinette, Cédric, jeune sidéen qui n’ose avouer son homosexualité à sa mère et dont le seul ami est un rat.

La maison semble avoir une âme, causant joies et peines, et pesant sur le destin de personnages tous biscornus. Un récit fascinant qui mêle l'épopée du XXe siècle, marqué par les guerres, aux portraits de familles étranges et sombres.

Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 02/11/2020 )
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