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Littératureet Romans & Nouvelles  

Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi
de Mathias Malzieu
Flammarion 2005 /  15 €- 98.25  ffr. / 160 pages
ISBN : 2-08-068818-9
FORMAT : 14x21 cm

C’est fini

Mathias Malzieu, le chanteur du groupe Dionysos, publie chez Flammarion son premier roman. Après un recueil de nouvelles très soigné et assez remarqué, 38 mini westerns (2003), Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi est le roman autobio-radiographique d’un enfant de trente ans qui perd sa maman, d’abord dans une chambre d’hôpital - «c’est effroyable le bruit d’un coeur qui casse», puis dans la maison - «c’est le début des caresses coupantes, celles qui se plantent dans les vieux souvenirs» -, enfin dans le cimetière : «Je veux te réveiller, je veux qu’on te rende à nous [...] j’organiserai ton évasion».

Le récit est bouleversant, au sens littéral, tant il met sens dessus dessous les vagues qui assaillent l’esprit, le corps et l’âme d’un enfant déboussolé, dont le coeur bat une chamade insolite, inédite face à un événement que la société occulte : la destinée de l’être humain dans sa finitude. Pour pallier ces carences et se préserver de son intense détresse, Mathias s’invente un compagnon imaginaire : Jack le géant, espèce d’E.T. d’outre-tombe, voyageur permanent entre l’ici et l’au-delà, dompteur d’ombres, guide initiatique vers la lumière, celle qui ramène à la vie. «Je suis là pour te réenclencher les mécanismes. Il te faut des histoires, pas seulement pour t’amuser».

Mathias combat ainsi le vide qui s’installe insidieusement partout ; c’est une histoire sans fin, sans happy end, c’est très bien "mal-écrit", c’est un cri, contenu par l’écriture, qui exploserait en dérapages incontrôlés, si griffonner des mots sur une feuille blanche n’était le seul exutoire possible au gouffre insondable de l’Absence. Les mots viennent sans qu’on y pense, fleuve intarissable de l’expression des douleurs, l’écriture prend son temps pour canaliser la rage insoutenable. Comme pour Alice, l’évasion dans le fantastique est peut-être une clef pour la compréhension. Comme Tim Burton, cette race de révoltés, fantaisistes visionnaires, à l’imagerie singulière, est apte à «toucher» à tous les coups.

Mathias Malrieu est un électron libre, émouvant, à l’écriture courte, sans contrainte, irréelle, absurde, survoltée et drôle. Il vit aujourd’hui à Toulouse, la ville dont Nougaro disait que «même les mémés aiment la castagne». Le passage à l’âge adulte n’est pas la priorité des grands enfants mais certains événements font grandir : «les cataclysmes, c’est lourd à digérer [...] mais c’est très bon pour la santé et ça fait grandir»...

Raymonde Roman
( Mis en ligne le 13/04/2005 )
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