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Littératureet Romans & Nouvelles  

Balco Atlantico
de Jérôme Ferrari
Actes Sud - Domaine français 2008 /  18 €- 117.9  ffr. / 185 pages
ISBN : 978-2-7427-7162-2
FORMAT : 11,5cm x 21,5cm

Chronique de morts annoncées en polyphonie corse

La Corse intérieure. Un village. Un café. Dans ce décors, une galerie de personnage vient se croiser, se heurter, s’aimer ou se détruire. Deux générations de nationalistes. Les plus vieux, idéalistes et pragmatiques tout à la fois, parfois proches de la désillusion. Les plus jeunes, fougueux, mais tendant à confondre militance et preuve de virilité. Un vieil ethnologue retraité, schizophrène, fabulateur, cynique, limite raciste, érotomane et sujet à diverses hallucinations. Le fantôme d’un colonel Corse qui au 18e siècle livra son village aux Français et au massacre. Deux jeunes marocains, un frère et une sœur, partis clandestinement pour suivre les chimères de l’immigration économique et échouer dans les cuisines des cafés insulaires. Une jeune fille amoureuse jusqu’à la vénération et la soumission. Sa mère courage.

Le roman s’ouvre sur une première mort, celle d’un des jeunes nationalistes, fauché par deux balles à bout portant, dans les odeurs de merde qui se dégagent de ses semelles. Une autre suivra dans le récit, celle de l’immigré. Comme un hommage à Garcia Marquez, Balco Atlantico est la chronique de ces morts annoncées, sur le mode de la polyphonie corse, soit vue par plusieurs narrateurs.

Si le livre échappe très heureusement au folklore de l’île de Beauté, il n’est pas, loin s’en faut, le roman politique que l’on pourrait attendre. Le nationalisme corse, vidé de toute idéologie, est limité à la présentation des figures imposées et schématiques d’une gesticulation militante. Ce n’est pas plus un grand roman de l’immigration : là encore, les désirs de départs et les désillusions d’arrivée des migrants marocains sont réduits à leur expression la plus simple. Reste une intrigue bien menée, servie par une langue ouverte et une plume habile, ainsi qu’une atmosphère pesante qui nous conduit sûrement au milieu des naufrages des différents personnages.

Mathilde Larrère
( Mis en ligne le 14/03/2008 )
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