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Ultima Necat - Journal intime - Tome 1 - 1978-1985
de Philippe Muray
Les Belles Lettres 2015 /  35 €- 229.25  ffr. / 619 pages
ISBN : 978-2-251-44522-9
FORMAT : 15,7 cm × 21,8 cm

L'Ecrivain au travail

Les Belles lettres éditent le premier tome du journal intime de Philippe Muray, intitulé Ultima Necat, qui couvre les années 1978-1985. Si l'on connaît Muray pour ses articles et chroniques hilarantes sur le monde postmoderne, on connaît moins son oeuvre romanesque. Il décida à 33 ans de commencer un journal qui ne serait édité qu'après sa mort.

Ce journal nous permet de rentrer dans l'atelier du romancier et de l'essayiste, et deviner l'inlassable travail opéré pour aboutir à une oeuvre cohérente, une pensée obstinée à saisir son époque et ce qui la meut en arrière-plan. Le lecteur assiste au labeur de fourmi et aux tâtonnements de l'écrivain sur des oeuvres familières au lecteur, au passionnant développement d'une pensée qui se compose jour après jour, ligne après ligne. Un travail solitaire qui tient à la fois du sacerdoce et de l'esthétisme, pour trouver les mots justes, les bons mots, des mots beaux, une petite musique de chambre qui diffuse secrètement le lancinant refrain d'un être. Rien à voir ici avec les écrivaillons qui ne pensent qu'à raconter leur petite vie à travers leurs romans. Philippe Muray laisse entrevoir le travail immense du romancier et de l'essayiste, qui sous-tend tout artisanat digne de ce nom. Faut-il rappeler que Muray aimait tout particulièrement Balzac et Céline ? Il évoque aussi divers écrivains ou des rencontres, son ennui de devoir écrire des Brigades Mondaines pour survivre - car il n'était pas un écrivain subventionné -, son calvaire aux États-Unis et d'autres faits de ce genre qui n'ont d'intérêt que dans l'unité du Journal.

Rentrer dans ce journal intime a quelque chose de «dérangeant» pour un lecteur qui sait que Philippe Muray n'avait rien d'un exhibitionniste. Une sorte d'anti-autoportrait se dessine, où l'on prend la mesure du travail effectué, qui aboutira au Muray que l'on connaît à travers ses article et essais. Parfois, Muray s'égare (ses développements sur le socialisme ne sont pas les plus convaincants) mais ce précieux journal permettra, espérons-le, à ceux qui veulent se lancer dans l'écriture de prendre la mesure de ce qu'est un écrivain.

On attend le second tome avec impatience, sur une époque où Philippe Muray a trouvé sa pleine maturité et démontré son immense talent.

Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 11/03/2015 )
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