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Littératureet Biographies, Mémoires & Correspondances  

Au grand jour - Lettres (1920-1930) - Un album. André à Simone Breton
de Collectif
Editions de la Rue d'Ulm - Aesthetica 2020 /  22 €- 144.1  ffr. / 214 pages
ISBN : 978-2-7288-0672-0
FORMAT : 19,1 cm × 20,1 cm

Michel Murat, Emmanuelle Sordet (Préfaciers)

Breton, première période

. «L’étreinte poétique comme l’étreinte de la chair tant qu’elle dure défend toute échappée sur la misère du monde» (André Breton, L’Amour fou, 1937)

André Breton (1896-1966) souhaitait que l'on rende publique sa correspondance 50 ans après sa mort. Depuis 2016, Gallimard édite progressivement l'intégralité de ses échanges épistolaires conservés avec, jusqu'à présent, des destinataires tels Eluard, Tzara, Picabia, Péret, Doucet et Simone Kahn, la première femme du poète surréaliste.

Une exposition en 2016 a permis la parution d'Au Grand jour qui, au travers de textes écrits par des spécialistes de Breton, commente la vie du couple en pleine aventure surréaliste. Lui est poète quand Simone, dans l'ombre du révolutionnaire, participe au mouvement avant-gardiste tout en aménageant l'atelier du 42, rue Fontaine et se procurant tableaux et objets divers. Alors que son rôle fut minime, les auteurs tentent de réhabiliter la femme de lettres en énonçant les menus faits de sa participation à l'aventure poétique de son mari, jusqu'à leur séparation en 1930, chacun vivant depuis peu des aventures extra-conjugales ! «Révolutionnaire-collectionneur-bourgeois», le couple Breton-Kahn fouine, achète, puis revend des tableaux selon l'état de leur compte en banque. Simone tient un temps la centrale surréaliste quand André écrit et se passionne pour la peinture moderne.

Les textes regroupés ici par des chercheurs demeurent inégaux (car souvent anecdotiques) ; ils reviennent sur la chronologie du couple d'un point de vue artistique et affectif. André Breton, refusant la fiction, n'a jamais écrit que sur ses visions poétiques (avec une grande part autobiographique) et la parution de ses correspondances renseigne sur ses activités annexes, tourmentées par des amours contrariés pour quelques femmes énigmatiques : Lise Meyer, Léona Delcourt (Nadja) ou encore Suzanne Muzard. Rappelons que, durant cette décennie, Breton publie de grands textes (et poèmes) surréalistes : Les Champs magnétiques, Clair de terre, Les Pas perdus, Manifeste du surréalisme, Le Surréalisme et la peinture, Nadja...

Outre ces textes quelque peu orientés vers une réhabilitation de Simone Kahn en tant que grande inspiratrice du mouvement (malheureusement, les rares témoignages peinent à convaincre) et l'excellente préface de Michel Murat, spécialiste du mouvement, l'intérêt de ce travail universitaire réside avant tout dans les nombreux documents (dont de très belles photographies) reproduits pour l'occasion et provenant de la collection particulière de Simone (dont curieusement les lettres adressées à André n'ont pas été retrouvées !). Le surréalisme, passé des jeux infantiles sans grand intérêt poétique, est aussi une belle aventure où l'amitié prend une place essentielle. Breton partait en vacances avec ses amis (même si des ruptures ont suivi) et les photos de ces jeunes gens témoignent d'une certaine nostalgie, un temps ancien à jamais perdu où il faisait bon vivre et écrire...

Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 08/04/2020 )
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