L'actualité du livre
Littératureet Essais littéraires & histoire de la littérature  

Houellebecq, écrivain romantique
de Aurélien Bellanger
Léo Scheer 2010 /  18 €- 117.9  ffr. / 299 pages
ISBN : 978-2-7561-0256-6
FORMAT : 13,9cm x 20,4cm

L’auteur du compte rendu : Docteur en Littérature française, professeur certifié en Lettres Modernes, Arnaud Genon enseigne à Casablanca. Visiting scholar de ReFrance (Nottingham Trent University), auteur de Hervé Guibert, vers une esthétique postmoderne (L’Harmattan, 2007), il a cofondé les sites herveguibert.net et autofiction.org.

Houellebecq héritier romantique

«Beaucoup de choses ont été dites sur Michel Houellebecq, sur son œuvre un peu moins», remarque l’éditeur, sur la quatrième de couverture du présent ouvrage. Il est vrai que les enquêtes, les biographies «non autorisées» publiées en 2005 étaient passées à côté du Houellebecq écrivain pour ne se focaliser que sur Michel Thomas, assurément moins intéressant que ses livres. Cependant, la recherche académique se penche depuis plusieurs années maintenant sur l’auteur de La Carte et le territoire récemment publié, comme en témoignent notamment les études de Sabine van Wesemael ou de Murielle Lucie Clément (1). L’approche d’Aurélien Bellanger s’inscrit donc dans un ensemble éditorial révélant que Houellebecq sait tout autant susciter l’intérêt médiatique que critique.

La thèse avancée par Aurélien Bellanger et annoncée par le titre est que Michel Houellebecq illustre, à travers son œuvre romanesque et poétique, un néoromantisme s’inscrivant dans une lignée d’écrivains tels que Lovecraft, Baudelaire, Novalis ou Balzac. L’auteur des Particules élémentaires revendique d’ailleurs lui-même cet héritage, déclarant, dans un entretien, avoir opté – au détriment d’une vision tragique – pour une vision «romantique de la vie dans la littérature» qui consiste en une «attitude de déni vis-à-vis de la mort». Au-delà de cet aspect intertextuel mis à jour de manière intéressante, le critique interroge notamment – et parmi bien d’autres entrées – la philosophie de l’histoire, l’ironie, l’amour ou encore la religion. L’analyse s’appuie en outre, et ce de manière régulière, sur la lecture de philosophes – Leibniz, Schopenhauer, Nietzsche – qui ont influencé la pensée de Houellebecq.

Si sur le fond l’étude est loin d’être dénuée d’intérêts – bien au contraire, elle éclaire souvent justement le travail de l’écrivain –, on pourrait reprocher à Aurélien Bellanger la forme qu’il lui donne parfois. Le critique, on le remarque dès les premières pages, connaît parfaitement son sujet. Mais cette maîtrise possède les défauts de ses qualités. A trop citer Houellebecq, à trop citer les auteurs qui l’ont influencé, l’analyse paraît se délier dans certains chapitres. Plus frustrant encore est l’impression que la citation se trouve souvent avancée comme preuve, comme argument, là où le lecteur attendrait que le critique mène la réflexion plus loin et dépasse les textes ou les auteurs convoqués. Mais disons pour conclure que l’essentiel reste tout de même préservé. C’est bien de littérature dont on parle ici, et Houellebecq le mérite bien.

Arnaud Genon


(1) De Sabine van Wesemael, on signalera les ouvrages : Michel Houellebecq, Rodopi, 2004 et Houellebecq : le plaisir du texte, L’Harmattan, 2005. De Murielle Lucie Clément, Houellebecq, Sperme et sang, L’Harmattan, 2003 et Michel Houellebecq revisité. L'écriture houellebecquienne, L’Harmattan, 2007. Ajoutons, Murielle Lucie Clément et Sabine van Wesemael (dir.), Michel Houellebecq sous la loupe,  Amsterdam/New York, Rodopi, coll. «Faux Titre», 2007.


( Mis en ligne le 20/10/2010 )
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