L'actualité du livre
Littératureet Essais littéraires & histoire de la littérature  

Un siècle érotique - Anthologie de la littérature érotique du XXe siècle
de Tran Arnault et Collectif
Omnibus 2010 /  28 €- 183.4  ffr. / 1027 pages
ISBN : 978-2-258-08140-6
FORMAT : 13,4cm x 20cm

Quand la littérature HOOQ…

À qui appartient-il, ce fessier appétissant, d’une parfaite rondeur, qui semble s’offrir et dont pourtant les orifices sont pudiquement dissimulés, d’en dessous, par les mains de sa propriétaire ? À quels seins se voue-t-elle, cette «prière» photographiée par Man Ray en 1930 et qui illustre la somptueuse anthologie Un siècle érotique des Éditions Omnibus ? Est-ce celui de La Comtesse au fouet de Mac Orlan ou de l’O imaginée par Pauline Réage ? Non, trop vierge de zébrures, pas assez tanné… Alors celui d’une des Trois filles de leur mère ? Mon petit doigt me dit qu’il s’agirait alors de l’aînée ! Ou peut-être ce morceau de roi est-il l’apanage exclusif du Boucher d’Alina Reyes ? L’énigme reste entière, et à qui voudra mener l’enquête, il suffira de se plonger dans ce délectable volume où s’enfilent à l’envi les plus belles pages fantasmantes et copulantes du siècle passé.

Presque tous les textes y sont reproduits intégralement, offrant en condensé une bibliothèque rose coquin (ou carrément rose cochon) aux parfaites malhonnêtes gens que nous n’avouons pas être. Une mention spéciale pour avoir rendu au grand public l’occasion de se frotter à la prose à la fois ondoyante et charnue d’André Hardellet dans Lourdes, lentes… ainsi qu’à un bijou : Le Petit ouvrage inachevé de Paul Léautaud. Un texte méconnu qui vaut pourtant son pesant de sel, le récit reposant sur la verdeur du langage que l’invétéré misogyne et sa fougueuse amante échangeaient avant, après et pendant l’acte. Et n’est-ce pas plus égrillard encore quand on sait le mari dans la pièce à côté ?

Tran Arnault présente de main de maître(sse) le sujet en signant une préface qui pique au vif la curiosité du lecteur. Elle y prend soin de rendre à un «genre» trop souvent circonscrit mal à propos ses lettres de noblesse. Car c’est de cela qu’il s’agit ici, avant même que de retroussements à la hussarde ou de fessées bien méritées : chacune des œuvres choisies témoigne du fait qu’écrire le sexe, c’est avant tout se coltiner avec «les mots pour le dire». Faire passer, via le langage, le frisson si particulier du désir n’est donc pas donné au premier venu. Ni à la première : on appréciera à ce propos le nombre de romancières, surclassant au générique la gent masculine !

Gainsbourg se plaisait à rappeler, entre deux soupirs de Bardot, que «l’amour physique est sans issue». Il n’avait apparemment pas songé à celle qu’offre la littérature.

Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 04/10/2010 )
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