L'actualité du livre
Littératureet Poches  

Le Septième jour
de Hua Yu
Actes Sud - Babel 2018 /  7.80 €- 51.09  ffr. / 268 pages
ISBN : 978-2-330-09706-6
FORMAT : 11,0 cm × 17,5 cm

Première publication française en octobre 2014 (Actes Sud - Lettres chinoises)

Angel Pino, Isabelle Rabut (Traducteurs)


Courage, mourons !

Yang Fei vient de mourir. Comme il est extrêmement pauvre, il n'a pas pu s'acheter de sépulture, il est donc condamné à errer dans le monde des morts. Chemin faisant, sa mémoire se précise, il se rend compte qu'il est mort dans une explosion, son état déchiqueté l'atteste. Il croise différentes «âmes», portant sur elles les stigmates de leur décès, certaines encore recouvertes de peau, d'autres réduites à l'état de squelette puisqu'elles sont là depuis longtemps.

Nous plongeons dans un univers figé, sans espoir, dans lequel une organisation effarante, humaine, range ces squelettes, leur donne un statut : point d'égalité dans l'au-delà. La description de ces Enfers n'est pas dépourvue d'intérêt, une sorte de monde poétique plein de générosité se dévoile peu à peu. Au fil des rencontres, Yang Fei croise d'autres défunts qui lui remettent en mémoire des éléments passés racontés de façon à ce que nous puissions reconstituer le puzzle de son existence, notamment l'importance de son père, qui l'a recueilli, perdu tout bébé, sur une voie ferrée, et lui a consacré sa vie. Le père étant décédé, le but maintenant de Yang Fei est de le retrouver dans ce royaume immense des pauvres de la mort.

Si Yang Fei est au centre de ce roman, d'autres personnages y figurent avec la même humanité, tel celui qui vend un de ses reins pour acheter un tombeau à sa petite amie, morte à cause de lui. On ne peut que constater que cette humanité, ce rapport altruiste à son prochain n'existent que dans ces limbes, car, pour ce qui est de la vie en Chine, Yu Hua se montre impitoyable. Sous couvert de cette intrusion chez les morts, il dénonce, à partir de décès bien sûr, toute la face sombre qu'il voit en Chine, sa malversation, sa corruption, ses lois draconiennes sur les naissances, les mariages, son organisation de la société et son hypocrisie.

Il faut bien du courage pour un tel pamphlet, et l'on en tire bizarrement la conclusion que le bonheur ne se rencontre pas dans la vie. Il peut peut-être se frôler dans la mort, au milieu des larmes de regrets.

Dany Venayre
( Mis en ligne le 18/05/2018 )
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