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Littératureet Poches  

La Rue
de Ann Petry
10/18 - Domaine étranger 2018 /  7.80 €- 51.09  ffr. / 382 pages
ISBN : 978-2-264-07279-5
FORMAT : 10,8 cm × 17,8 cm

Martine Monod, Nicole Soupault, Philippe Soupault (Traducteurs)


Noir !

Romancière afro-américaine, Ann Petry (1908-1997) est née dans une famille des classes moyennes et poursuit des études de pharmacie au Connecticut College of Pharmacy de New Haven. Après avoir exercé dans la pharmacie familiale, son mariage en 1938 avec George D. Petry la conduit à s’installer à New York. Elle peut alors donner libre cours à sa vocation littéraire en publiant des nouvelles dans la presse (The New York Amsterdam News, People’s Voice, The Crisis), en écrivant des romans, des essais et de la littérature jeunesse.

La Rue, publiée en 1946, est son premier roman et son roman le plus célèbre. Ce roman noir traduit l’expérience d’Ann Petry qui, enseignant en école élémentaire à Harlem dans les années 1940, constate l’impossibilité pour ses jeunes élèves d’espérer un avenir meilleur. La première phrase pose le décor et donne le ton de l’ensemble : «Le vent glacé de novembre balayait la 116e rue. Il secouait les poubelles, aspirait les rideaux par les fenêtres ouvertes et les renvoyait claquer contre les carreaux». Dans cet univers glacé habité par une population noire que tous laissent à l’abandon, une jeune femme courageuse, Lutie Johnson, tente de s’en sortir, pour elle et pour son fils Bub. Parviendra-t-elle à renverser le destin ?

Au-delà de la fin, prévisible, Ann Petry campe le décor d’un Harlem sans illusions, habité d’êtres abîmés par leurs conditions de vie, sans espoir aucun, qui survivent en vendant ce qu’ils peuvent. Dans cet univers sombre, tout peut se vendre ou se troquer : une jolie silhouette, un petit talent… Ce sont aussi les années de l’apogée de la discrimination des Noirs, ravalés systématiquement au rang d’inférieurs.

Ann Petry fait évoluer son personnage, Lutie, dans un milieu sordide entre le concierge libidineux, Mrs Hedge, patronne de bordel, Boots Smith le musicien, Junto le blanc, patron véreux de bar de casino… Si Lutie est un personnage lumineux, ce n’est le cas d’aucun de ceux qui l’entourent, son père Pop, ses employeurs blancs, les différents acteurs de la rue. La rue elle-même est un personnage central du roman, école du malheur et de la misère.

Une écriture dense pour dire l’irrémédiable malheur des petits, voués dès l’enfance au Mal.

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 12/11/2018 )
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