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Barcelone fin de siècle

Hazan 2001 /  57.25 €- 374.99  ffr. / 500 pages
ISBN : 2-85025-790-7
FORMAT : 24 x 32

Dans l’ombre de Gaudi

Barcelone ? C’est comme un cliché : Gaudi, Gaudi, Gaudi… Jusqu’à
l’overdose surtout en cette année, qui marque le 150e anniversaire de sa
naissance. L’architecte illuminé, bougon, mysogyne et mystique, mort
sous un tramway, est devenu le principal ambassadeur médiatique de sa
ville avec le club de football du Barça et l’opéra du Liceu. Son ombre porte
trop loin et cache tous ses collègues du modernisme, ce mouvement qui
secoua la capitale catalane à la fin du 19e siècle. C’était l’époque où un
urbaniste visionnaire, Ildefonso Cerda, dessinait une extension au centre,
devenu trop congestionné, trop gothique, trop populaire. Les nouveaux
quartiers de l’Ensanche, un quadrillage précis tranché par l’avenue
Diagonal, devaient accueillir les bourgeois aisés à la recherche du
confort moderne. Les blocs d’immeubles, ou manzanas y avaient,
comme ceux du Paris haussmannien, les caractéristiques pans coupés
aux carrefours.

Ce grand chantier de rénovation urbain, qui culmina avec l’Exposition
universelle de 1888, a donné à Gaudi et à ses pairs l’occasion
d’innombrables commandes. L’épais volume, rédigé par des
spécialistes, ne se limite pas au corpus gaudien. La divinité tutélaire est
abondamment explicitée avec le Park et la Colonia Guell, voulues par un
grand industriel textile, la casa Milà, la casa Battlo ou le couvent des
Thérésiennes. Mais sa présence n’écrase pas l’importante colonie qui
l’accompagne : Domenech i Montaner (hôpital de Sant Pau ; Palais de la
Musique, récemment restauré sous la direction d’Oscar Tusquets ;
maison d’édition Montaner i Simon, devenue le siège de la fondation
Tapies), Puig i Cadafalch (casa Amattler), Jujol (casa Negre, céramiques
du park Guell), Martinell i Brunet, Rubio i Bellver et tant d’autres, qui
opèreront dans toute l’Espagne.

L’intérêt de l’ouvrage est de montrer que le modernisme catalan, comme
l’Arts and Crafts de William Morris et davantage que l’Art nouveau
français, entendait embrasser l’art dans tous ses domaines et lui forger
un lien, jusqu’alors manquant, avec le monde industriel. Derrière
l’architecture, sont donc abordés la sculpture (le monument au docteur
Robert par Llimona), le mobilier (avec d’intéressantes photographies
anciennes montrant l’ameublement de l’époque), la peinture (Ramon
Casas, Santiago Rusiñol, Isidre Nonell), la publicité (pour les chocolats
Juncosa, les draps Dalmau Tolra, l‘anis del Mono, les cycles
Cosmopolis), la musique, la littérature (Roviralta et Alexandre de
Riquer)… Le contexte socio-historique, avec l’industrialisation accélérée
des vallées catalanes, la montée de l’anarchisme et la sanglante
Semaine tragique de juin 1909, apparaît habilement en filigrane. Et la
cathédrale de la Sagrada Familia, direz-vous ? On y travaille encore…


Rafael Pic
( Mis en ligne le 11/01/2002 )
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