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Vitamine Ph. - Nouvelles Perspectives en Photographie
de T.-J. Demos et Collectif
Phaidon 2007 /  69,95 €- 458.17  ffr. / 350 pages
ISBN : 978-0-7148-9709-7
FORMAT : 28,0cm x 30,0cm

[Ph]ormidable

Dans la ligné de Vitamine P (comme peinture) et de Vitamine D (Dessin), Vitamine Ph (Photo), dernier né chez Phaidon, donne un savoureux compte rendu de la création photographique contemporaine, depuis environ 5 ans. Chacun des artistes sélectionnés est représenté par un acronyme, symbole non plus chimique mais artistique, à caser dans un tableau de Mendeleïev d’un genre nouveau : l’idée est géniale, visuellement parlante, graphique, pratique. Bien vu.

Opérée par un jury international réunissant critiques, conservateurs et artistes, une sélection de 121 photographes est ici présentée : un parcours riche, parfois déroutant mais par lequel, si l’œil se laisse conduire, une véritable initiation à cet art particulier s’opère. Particulier parce que, disons-le en osant le truisme, la photographie aujourd’hui est panoptique. Elle est aussi démocratique, à ce point banalisée via le numérique que tout un chacun peut s’y essayer et faire œuvre. Un art entrecoupé (parasité ?) par le journalisme, la mode ; croisée des chemins où la photographie s’aiguise tout en risquant de perdre de son essence.

Ici avant-gardiste, la photo se fait volontiers critique, politiquement engagée, montrant de l’objectif des réalités sinistres, parfois embellies (danger ?) sous l’œil du photographe, qu’il s’agisse de la Grande histoire, les guerres (An-My Lê et l’Irak, Ahlam Shibli et les soldats palestiniens, la série «Survivor» de Liu Zheng), les régimes en ruines, les attentats et les émeutes, ou celle plus intime, banalisée : tant de photographes excellent dans la peinture de sociétés moribondes, prisonnières de schémas appliqués, la consommation (Anne Hardy, Hans Eijkelboom, les photo snack/pop de Sharon Core), l’ennui suburbain, étrange misère des classes moyennes (Tim Davis, les portraits suburb/trash de Phill Collins).

En outre, la photo ne passe plus par le prisme unique de la lumière : collage, photomontage, retouches et effets visuels font entrer l'art dans une nouvelle ère où ce qui est montré, comme au cinéma, n’a parfois jamais existé : voir le Guggenheim de Bilbao transformé en mosquée (groupe AES + F). D’autres sont tout simplement belles : le papillon de coton ou l’étrange œil perdu dans l’azur de Rinko Kawauchi par exemple.

Il faut certes aimer la photographie pour parcourir ce beau livre, prendre le temps de «rentrer» dans un cliché car certains, un grand nombre en fait, sont hermétiques, porteurs d’un message dépassant l’impression esthétique. Ita est dans l’art contemporain : mutique, la photo a toujours énormément à dire sur la surface glacée où elle s’incarne. Prenons le temps de ce dialogue…

Bruno Portesi
( Mis en ligne le 19/11/2007 )
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