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Symbolique des Kilims
de Ahmet Diler & Marc-Antoine Gallice
Bleu autour - D'un regard l'autre 2017 /  36 €- 235.8  ffr. / 237 pages
ISBN : 978-2-35848-087-1
FORMAT : 24,8 cm × 30,8 cm

Jacques Lacarrière (Préfacier)

Langage de tisserandes

Un beau livre, grand format, beau papier, édition soignée (et prix modique) pour tout apprendre sur les kilims, ces tapis issus de techniques millénaires, que les femmes anatoliennes continuent de tisser en suivant une tradition toujours vivante : «Le kilim, mot d’origine controversée, est un tissage à point plat qu’on nomme ainsi dans le vaste espace où il arbore la même iconographie et qui s’étend des Balkans (…) à la Chine (…) en passant par la Turquie, l’Iran, le nord de la Syrie et de l’Irak, le Caucase (…) et l’Asie Centrale(…)».

Spécialistes du kilim, les deux auteurs ont choisi d’expliquer les nombreux symboles que les femmes inscrivent dans leurs tissages. Leur travail est le résultat d’une longue enquête d’une trentaine d’années, qui permet de mieux comprendre toute la richesse culturelle, au-delà du décor esthétique, de ces tapis. Deux parties : ''Le kilim dans tous ses états'', qui permet de saisir la variété des genres de kilims, et ''Les symboles des kilims'', qui dresse un catalogue raisonné et foisonnant des motifs utilisés. Losange, gueule du loup, dragon, main, etc., certains aisés à reconnaître, d’autres très stylisés. Une couleur dominante : le rouge.

«Fécondité, fertilité et protection sont les trois grands thèmes qu’exprime la symbolique des kilims» : pour se livrer à leur enquête, les auteurs ont interrogé les tisserandes, les documents archéologiques, ont questionné sans relâche. Ils identifient dix-neuf symboles. Dans cet espace du Proche Orient et d’Asie Centrale, la Déesse Mère a traversé les siècles, de Cybèle à Marie : un motif «main sur les hanches», qui pourrait figurer une femme enceinte, se tenant ainsi pour soulager son dos. Seul motif anthropomorphe des kilims, ce motif, nommé eli belinde en turc, est un symbole de fécondité et de fertilité présent dès 7000 ans avant J-C sur le site de Çatal Höyü,k en Anatolie centrale.

Un symbole de virilité : les cornes de bélier (ou encore les cornes de taureau), motif qui «symbolise la puissance, la bravoure et la fertilité masculine», déjà présentes sur des céramiques néolithiques. Le dragon «maître du ciel et de l’eau» est à la fois symbole de fertilité en tant que signe d’eau, et protecteur en tant que gardien de trésors. Symbole bénéfique, entre ciel et terre, l’oiseau, lui, représente «(…) l’espoir d’une vie dans l’au-delà, la jonction avec les ancêtres qui veillent sur les vivants et le désir de procréer». Chaque symbole est expliqué, et accompagné de nombreuses illustrations qui montrent à la fois la diversité des modes de représentation au fil des siècles, et leur continuité.

Un ouvrage tout à fait passionnant qui conduit à regarder d’un autre œil ces kilims qui au-delà de leurs qualités esthétiques transmettent des croyances et des histoires séculaires, voire millénaires.

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 26/01/2018 )
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