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Pocheset Littérature  

La Diagonale du vide
de Pierre Péju
Gallimard - Folio 2011 /  6.20 €- 40.61  ffr. / 295 pages
ISBN : 978-2-07-044067-2
FORMAT : 11cm x 18 cm

Première publication en août 2009 (Gallimard - Blanche)

Redemption Road

l y a toujours un plaisir réel, jamais érodé, à voir surgir dans la brousse d'une production littéraire des noms connus et appréciés, dont on attendait silencieusement la venue d'un nouveau roman. Pierre Péju est de ceux-là, une valeur sûre. De Péju, on avait tremblé à la lecture de sa Petite chartreuse et fort aimé ensuite Le Rire de l'ogre et Coeur de pierre. Ce roman, aujourd'hui au format poche, au titre tout aussi cinglant - La Diagonale du vide -, assurera au lecteur fidèle à l'auteur des retrouvailles agréables et sincères. Avec toujours pour oxygène cet humanisme attristé qu'on nommerait aussi tendre misanthropie...

Le titre renvoie sans mystère, sinon pour habiller quelques métaphores, sur les affres de l'existence, les points morts de l'histoire, à cette notion géographique apprise sur les bancs des écoles, cette balafre rassemblant une France sinistrée, désindustrialisée, rurale-exodée, bande fantomatique parcourant notre territoire du sud-ouest au nord-est. Et parcourue par deux êtres hantés par leurs propres spectres...

Marc Travenne est un designer en pleine «diagonale du vide» sur le territoire de sa propre vie : après la mort de l'âme-frère, l'ami d'enfance devenu ami de toujours, Matthieu, collègue avec qui il monta une affaire à succès, déjà abandonné par une femme et des enfants que cette amitié et ce travail annulaient, décide la table rase, laisse son travail, sa vie, et part marcher au long de ces chemins oubliés. Là, il rencontre une femme énigmatique, qui s'appelle Marion, qui a de l'Amazone la force et la beauté, le mystère et les cicatrices, des blessures même, qu'elle cherche à panser, semble-t-il, en remontant cette diagonale répertoriée sur les cartes IGN, et sur les conseils d'un obscur mentor.

Marion fascine Marc qui décide de la suivre et de mieux la connaître, se risquant par là-même à un flirt dangereux avec la Vérité, touchant aux plus hautes sphères de l'Etat. Car ils ont beau évoluer au coeur du désert français, Marion fut militaire et son secret concerne des affaires classées secret d'Etat, sous d'autres latitudes : l'Afghanistan, sa lumière... et ses massacres...

Entre temps, Marc aura renoué avec un flirt de jeunesse, Irène, à présent en fin de vie, la faute à un cancer, et connu le fils de cette journaliste, qui le séduit par ses dessins sombres et alambiqués. Marc remontre sa propre diagonale, sa propre vacuité. Et le lecteur marche avec lui...

Volontiers, goulûment, enveloppé par le plume de Péju et une intrigue qui, quoique sonnant trop son «roman de gare» avec un suspense facile, emporte par les ambiances décrites et les états d'âmes des différents personnages, tous en quête d'une rédemption. Un roman puissamment humaniste, une réflexion suave sur le mal, soit-il violence d'être, malice ou maladresse. Assurément l'un des auteurs à connaître et à lire.

Bruno Portesi
( Mis en ligne le 08/07/2011 )
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