L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

Mort de Bunny Munro
de Nick Cave
Seuil - Points 2011 /  7 €- 45.85  ffr. / 332 pages
ISBN : 978-2-7578-2104-6
FORMAT : 11cmx18cm

Première publication française en janvier 2010 (Flammarion)

Traduction de Nicolas Richard


Alcoolo-addicto-queutard...

Bunny Munro n'est pas un personnage sympathique. VRP en produits de beauté, paumé de chez paumé, alcoolo-addicto-queutard... Et un époux adultérin, d'une infidélité telle qu'elle en est criminelle : le roman s'ouvre sur le suicide de l'épouse de Bunny, alors que ce dernier, en déplacement professionnel, fait crier l'une de ses anonymes conquêtes. Son épouse décède dans la chambre du couple, fermée à clé, alors que leur fils, Bunny Jr, attend, seul, dans le salon...

Époux indigne, père infâme. Le décès ne rend que plus glissante une pente fortement descendante. Chute libre. Son fils à l'arrière, cramponné à son encyclopédie car la culture, le savoir, est le second pôle de son monde où - hélas - papa tient la première place. Maman est devenue un fantôme aux conseils et avertissements salubres. Papa, lui, continue de jouer avec la mort. Ses produits cosmétiques d'un côté, sa lubricité de l'autre, il visite le temps d'une dernière journée (la fin est annoncée dans le titre) plusieurs clientes, qu'il séduit, embobine, saute et laisse derrière... : "... il a beau être dans un sale état, il ressent une sorte de transmutation alchimique à l'intérieur de son slip léopard, où une souris d'un naturel doux se transforme en un giga braquemart de chez Krypton..."

Cette citation, échantillon d'un inépuisable florilège, résume le roman. L'histoire d'une déroute, road movie glauque, triste, mais touchant aussi, d'un père condamné et coupable. Les scènes du même acabit se succèdent, noria de femmes réduites à leur vagins (ce Don Juan de seconde zone fantasme d'ailleurs sur ceux d'Avril Lavigne et Kylie Minogue) passant devant la virilité ébréchée de ce terrifiant anti-héros. L'accumulation des scènes fatigue d'ailleurs assez vite. La fin heureusement mérite qu'on s'attarde à la lecture et laissera l'impression d'un roman pas si vain et visant juste.

Un roman pas vraiment Rock n'Roll, plus proche de Trainspotting que de Kerouac. Une écriture tenue en bride : nerveuse, amphigourique, imagée, très imagée, et toujours bien rythmée (en la matière, la traduction tient la route, contrairement à Bunny Munro) : une joyeuse désespérance.

Thomas Roman
( Mis en ligne le 20/05/2011 )
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