L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

Et rester vivant
de Jean-Philippe Blondel
Pocket 2013 /  6.10 €- 39.96  ffr. / 168 pages
ISBN :  978-2-266-22795-7
FORMAT : 11,0 cm × 18,0 cm

Première publication en septembre 2011 (Buchet Chastel)

Road trip

Des phrases courtes qui fondent un style, musical, lapidaire, efficace, mais poétique aussi, porté par le "je" d'un homme revenant sur sa jeunesse, ses 22 ans, quand, d'une certaine façon, se décida sa vie. 22 ans, quand mourut son père alors qu'on devait lui arracher des dents de sagesse (l'entrée dans la vie adulte, assurément) ; un accident de voiture, un accident de plus après celui, causé toujours par son père, qui emporta les vies de sa mère et de son frère. Le voici donc seul au monde, sans parents et sans ses dents de sagesse...

Seul, ou presque, car il peut compter sur le soutien de Laure, l'ex qui s'attache, et de Samuel, l'ami autodidacte, le quasi-frère en âme soeur. L'héritage impromptu, une fois expédiés les funérailles et le deuil, permet une escapade. Il veut rejoindre Morro Bay, en Californie, le Morro Bay chanté par Lloyd Cole ("Rich") qu'il écoute alors en boucle.

Jean-Philippe Blondel met en fiction ce ''trip'', deuil sur roues et les lignes parfaites des horizons américains. Tout français ayant tourné entre Los Angeles et San Francisco, s'étant ébaubi devant le Grand Canyon et Monument Valley, et goûté avec frissons aux ambiances si littéraires de ''diners'', de motels et des tronçons de la Route 66 (Kerouak, Fante, fantastiques passerelles pour les amis de l'Amérique que nous sommes, et la musique bien sûr), ces Français là (qui sont si nombreux !) aimeront suivre le jeune Blondel dans sa juvénile pérégrination, sourire à Rose et son motel improbable au coeur de la Vallée de la Mort, ou angoisser sous l'oeil condescendant d'un flic à moto et gros bras.

Un road trip qui sert le deuil et l'apprentissage, jusqu'à la destination qu'il s'était fixée. Jean-Philippe Blondel dit énormément en peu de mots, et le roman se lit d'un savoureux et revigorant cul-sec littéraire. Sur les images d'une Amérique connue et fantasmée (Las Vegas, le Mexique, Hollywood Boulevard, Big Sur, etc.), l'auteur en ''remembrance'' (terme américain pour évoquer la remémoration proustienne) vient coudre quelques souvenirs de sa famille disparue, moments papillons ici épinglés, doux, amers aussi, nécessaires : "J'ai vingt-deux ans et je suis le dépositaire de leurs histoires inachevées. J'ai vingt-deux ans et je suis un reliquat de récits. Une survivance. Un putain de séquoia".

On est alors triste et heureux pour ce jeune homme apparemment bien grandi.

Thomas Roman
( Mis en ligne le 12/04/2013 )
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