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Pocheset Littérature  

Crépuscule
de Michael Cunningham
10/18 - Domaine étranger 2013 /  7,50 €- 49.13  ffr. / 285 pages
ISBN : 978-2-264-05931-4
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en février 2012 (Belfond)

Anne Damour (Traducteur)


L'asphalte et le souffre

Cunningham ; l'asphalte et le souffre... La conjonction des malaises, celui urbain d'un animal humain perdu dans sa jungle, LA jungle, Manhattan et ses baobabs de béton et de verre ; celui existentiel d'un homme suffisamment avancé dans la vie – il a la quarantaine – pour que s'éveillent quelques fantômes : les regrets, les envies, la force et l'énergie de passions trop longtemps refoulées. L'homosexualité, thème filtrant l’œuvre du romancier américain.

Peter est galeriste. Pas Gagosian, mais il est suffisamment installé pour pouvoir pêcher en eaux riches et profondes les Warhol de demain, et côtoyer les grands de ce – petit – monde. Sa femme, Rebecca, est éditrice d'un magazine qui prend l'eau. Un vieux couple encore jeune, très new-yorkais, en légère crise. Plus au nord, à Boston, une fille aux choix de vie incompréhensibles, et avec qui Peter peine à chausser ses bottes de papa.

Une crise révélée, catalysée par le frère de Rebecca, Mizzi : jeune citoyen du monde au Q.I. aussi vaste que gâché. Un ''fils de'' en habits d'aventurier esthète, tout juste de retour d'une retraite au Japon. Besoin de spiritualité, de fuite, d'évasion. Les drogues en fin de course. Brillant mais pommé, Mizzy est un membre de la junky-sphère.

Et Peter tombe amoureux. Une relation ambiguë, mais finalement délicieuse, mais aussi douloureuse, se noue entre Peter et son beau-frère.

C'est l'analyse de cette dérive des sentiments que Michael Cunningham propose ici. L'étonnement d'un homme qui n'était pas prêt à ''tomber'' pour un autre homme, jeune homme, chez qui, peut-être l'attirent plus sa beauté et sa jeunesse, intrinsèquement liées, que sa masculinité même.

Comme pour ses précédents romans, Les Heures, Le Livre des jours, on aime la finesse dans l'analyse des psychés humaines, le sens du détail, le souci des ambiances (en quelques pages, l'errance nocturne de Peter dans la ville, parcourant Downtown de SoHo jusqu'au quai admirant Madame Liberté, vaut à elle seule qu'on se jette sur ce roman). On regrette simplement la structure linéaire du récit, alors qu'on aimait tant les allers-retours, effets de miroirs et mises en abîmes des précédents titres. Tout est plus simple ici, et donc plus vite dit.

Thomas Roman
( Mis en ligne le 27/03/2013 )
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