Poches
Littérature de Benoît Duteurtre
Gallimard - Folio 2014 / 7,40 €- 48.47 ffr. / 296 pages
ISBN : 978-2-07-045268-2
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm
Première publication en août 2012 (Fayard)
Rastignac des années 1980
Benoît Duteurtre place en exergue de son roman les dernières lignes du Père Goriot, lorsque Rastignac, du haut de la colline du Père Lachaise, affronte Paris : «A nous deux maintenant !». Un roman davantage qu'un récit autobiographique, comme les deux précédents (Les Pieds dans l’eau, l’Eté 1976), encore que dans un épilogue nostalgique sur les années 1980, années de crise, années du SIDA, mais aussi «ce moment où certains jeunes gens, fidèles à l’idéal de la modernité crurent manifester leur liberté en inventant quelque chose de neuf…», Benoît Duteurtre remarque : «Mais, puisque Jérôme me ressemble comme un frère, j’aimerais que son destin n’illustre pas seulement l’histoire d’une génération».
Nourri de musique et d’espoirs, Jérôme Demortelle, rejeton d’une digne famille provinciale, réalise son rêve, grâce à la générosité de sa grand-mère : vivre à Paris. Mais cette générosité, comme le carrosse de Cendrillon, a un terme annoncé : un an, afin que d’autres petits-enfants puissent en profiter à leur tour.
Pour ses parents, cette année doit être studieuse, consacrée à des études d'histoire de l’art. Jérôme a, lui, une toute autre vision des choses… Son choix n’est pas celui du Paris diurne de la Sorbonne, mais de celui nocturne des Halles, des clubs de jazz, des Bains-Douches, des filles et des musiciens, qu’il va arpenter fébrilement. Fou de musique, vêtu en «punk» avec «son pantalon de plastique noir, son tee-shirt rouge et son blouson de cuir», il se brûle à un monde pour lequel il n’est pas bien armé. Quelques minces succès, des moments de bonheur, la découverte hésitante de ses goûts sexuels, des erreurs en série, l’apprentissage de la cocaïne, et deux fins possibles pour celui qui, pour l’auteur, est le héros d’une génération Janus : années SIDA / années fric.
Le récit de Benoît Duteurtre est drôle, parfois pathétique, bien écrit, dans sa description de cette année initiatique, avec en arrière-plan des descriptions au vitriol de la famille normande.
Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 20/01/2014 )
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