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Pocheset Littérature  

La Symphonie du hasard - Livre 3
de Douglas Kennedy
Pocket 2019 /  7,90 €- 51.75  ffr. / 478 pages
ISBN : 978-2-266-29158-3
FORMAT : 11,0 cm × 18,0 cm

Première publication française en mai 2018 (Belfond)

Chloé Royer (Traducteur)


Retour à New York

Suite et fin de la trilogie de Douglas Kennedy : Alice Burns est désormais de retour à New York, après le terrible attentat de l’IRA auquel elle a survécu. Au cours de l’attentat Cioran, son amoureux est mort et Alice doit apprendre à renouer avec la vie, à oublier les images dramatiques ; stress post-traumatique dirait-on aujourd’hui, mais dans les années 1970, une réalité méconnue.

Alice se réfugie donc à New York après un bref passage chez sa mère. Ses parents s’éloignent de plus en plus, et la question de leur divorce s’impose. Peter devient un écrivain reconnu à la suite de son récit autobiographique dans lequel il narra son séjour chilien, la mort terrible de sa compagne, les tortures, la terreur, plaçant son père au cœur de ses accusations pour avoir servi dans le cadre de la CIA le régime du général Pinochet. Adam, le jeune frère, quitte son emploi peu rémunéré d’entraîneur de hockey pour se lancer dans la Bourse, avec grand succès. Il épouse une jeune américaine issue de l’Amérique profonde, et adopte avec enthousiasme les codes conservateurs qui commencent à s’imposer.

Années 1980, années fric, années «bling bling» comme on ne disait pas encore à l’époque, Reagan est élu, le souvenir des années hippies s’estompe doucement, la consommation est l’horizon partagé. Chancelante, soutenue par des amis solides, Alice retrouve peu à peu un équilibre fragile, termine son cursus universitaire, devient professeur, puis enfin éditrice. Elle renoue avec sa famille qui semble moins dysfonctionnelle, ses parents séparés vivent l’un et l’autre à New York. Sa mère s’accomplit enfin, trouvant un terrain de choix où déployer son énergie : le monde de l’immobilier en plein essor dans une ville qui vit une réhabilitation accélérée, après être passée à deux doigts de la faillite.

Douglas Kennedy décrit ces transformations du New York des années 1980, qui de ville sale et insécure, devient une métropole enviée, débordante de vitalité. Brooklyn n’est pas Manhattan, mais ce n’est plus un ghetto misérable ; toute une population de jeunes trentenaires ambitieux choisit d’y habiter. Douglas Kennedy décrit ce milieu qu’il connaît bien : celui des cocktails mondains organisés par les éditeurs à l’occasion du lancement de leurs livres, clubs de jazz, soirées diverses, mais aussi tavernes oubliées, vestiges du New York des années soixante.

Les années 1980 sont aussi les années SIDA, les amis d’Alice sont décimés, et les deux épidémies cheminent de conserve dans le roman : frénésie boursière et VIH. Les parents d’Alice décident finalement de divorcer, Peter échoue dans ses ambitions littéraires et se réfugie dans un journalisme d’accusation, Adam s’abime dans la quête de millions, fasciné par son «gourou boursier» qui l’entraîne à des opérations de plus en plus douteuses. On croise l’espace d’un instant un jeune loup vulgaire, qui affirme péremptoire ''je serai président'' ; son nom : Donald Trump… Alice, elle, poursuit sa reconstruction, à pas lents mais sûrs.

Tout ceci finira inégalement bien (ou mal) pour les différents protagonistes, et sans dévoiler les rebondissements ultimes citons la dernière phrase prononcée par Alice : «Mais pour ceux d’entre nous qui sont toujours là, sur le chemin, que dire de ce qui les attend ? Quels mots suffiraient à résumer ce qui s’étend devant nous ? À suivre…».

Une trilogie de lecture aisée qui parcourt les années américaines 1960/1980, et offre le charme de présenter des personnages bien construits, dans des cadres variés, celui de New York étant le plus réussi. New York «la» ville romanesque par excellence.

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 19/04/2019 )
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