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Pocheset Littérature  

Havana Room
de Colin Harrison
10/18 - Domaine étranger 2006 /  9.30 €- 60.92  ffr. / 508 pages
ISBN : 2-264-04265-6
FORMAT : 11,0cm x 18,0cm

Première publication française en janvier 2005 (Belfond).

Traduction d'Oristelle Bonis.


Dans la tradition du roman noir américain

On pouvait lire dans le New York Times à propos de Havana Room : «Harrison est à New York ce que Chandler et Ellroy sont à Los Angeles», commentaire très indulgent, de ce gros roman noir, le cinquième de Colin Harrison, journaliste, et éditeur new-yorkais.

Havana room répond aux lois du genre : suspense, personnages nombreux, intrigue à rebondissements (trop ?) ; la lecture n’est pas désagréable, mais il y avait sans doute bien davantage à tirer d’une sombre affaire de spéculation immobilière, que ce récit gentil, écrit à la première personne par le héros Bill Wyeth, avocat distingué qui, nous dit l’auteur, a tout perdu : mais la tragédie s’abattant sur ce malheureux avocat d’affaires, illustration parfaite du cadre américain tel qu’on l’imagine, manque de vraisemblance. Colin Harrison assène au lecteur une accumulation des types sociaux que l’on s’attend à trouver à New York : la femme dure en affaires (deux versions : l’octogénaire et la quadra/quinqua), les noirs sortis tout droit d’un film de Spike Lee, les sans abris pauvres et les marginaux de Brooklyn, le flic revenu de tout, les femmes chics des beaux quartiers et leurs enfants bien peignés, tandis que l’autre personnage autour de qui se construit l’histoire, Jay, a le physique d’un héros de Scott Fitzgerald, américain typique, amateur de base-ball, soucieux de construire sa vie, lutteur en dépit de tous les malheurs qui l’accablent.

L’auteur consent des ouvertures à l’étranger : passent au milieu de ce monde conventionnel le mystérieux Monsieur Ha, qui semble tout droit échappé du Alice de Woody Allen, un anglais, ancien étudiant d’Oxford, un latino américain louche ; vieille Europe, Nouveau monde se rejoignent à New York, ville de toutes les possibilités, et le lecteur en a pour son argent. Quelques paysages urbains, rapidement évoqués : Brooklyn, Upper east side… Si les hommes sont bien servis, les femmes, elles, (à l’exception de la mère de Jay), quels que soient leur âge et leur statut social, sont des aventurières triomphantes dans la jungle new-yorkaise, plus proches de la mante religieuse ou de la lionne affamée, que de la madone.

Quant à l’intrigue, disons qu’elle est assez classique, même si l’auteur la complique de psychologie familiale, et n’épargne généreusement aucun rebondissement, flirtant avec le fantastique et la mystérieuse «havana room» dans la steack house où le héros a fini par trouver un refuge après la destruction de son univers quotidien. L’histoire se construit donc autour de Bill Wyeth et Jay Rayney, avec cette amitié masculine, souvent utilisée comme ressort dans la littérature américaine.

Somme toute, voici une lecture passe temps, mais pas essentielle, pour découvrir New York (l’auteur replace une fiche utile : un petit résumé historique de la construction de Manhattan). Héritier dans une certaine mesure (mais en moins efficace) du Tom Wolf du Bûcher des vanités, Colin Harrison peut sans doute mieux faire ; actuellement il semble plus proche de Mary Higgins Clark que de Chandler ou d’Ellroy…

Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 19/07/2006 )
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