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Bande dessinéeet Historique  

Le Temps du rêve (tome 1) - Gallipoli
de Stéphane Antoni et Olivier Ormière
Delcourt 2011 /  13.50 €- 88.43  ffr. / 48 pages
ISBN : 978-2-7560-1791-4
FORMAT : 23x32 cm

Dure réalité

Gallipoli, 1915 : les Alliés tentent une opération de diversion en débarquant dans la péninsule turque de Gallipoli, de façon à prendre les Dardanelles… Une opération risquée, ruineuse en vies humaines. Et dans cet enfer qui vaut bien celui des tranchées du Nord de la France, un homme, Freeman, tente de survivre. Il n’est certes pas le seul, mais lui a une histoire qui fait déjà de lui, depuis longtemps, un survivant : aborigène, rescapé du massacre perpétré par les Australiens pour occuper les terres de ses ancêtres, victime d’une société et d’un Etat racistes qui l’ont privé de son identité même, Freeman débarque, comme les autres soldats, dans un enfer. Mais sa culture aborigène, fondée sur une autre perception de la réalité, dans les plis de laquelle se cacherait le temps du rêve, l’amène à envisager la guerre, el combat, de manière différente. En butte aux discours racistes de son commandement et des autres soldats, il croise toutefois quelques hommes qui, pour des raisons diverses, vont partager son regard différent sur la guerre…

La grande Guerre, encore et toujours : une source d’inspiration pour les auteurs de BD. Mais, de même qu’au cinéma, le front des Dardanelles est rarement représenté (on compte toutefois le très bon Capitaine Conan dans le genre…). Cet album est donc original, et même à plus d’un titre : car dans les plis de cette guerre, l’histoire de Freeman est, en soi, un récit haletant. L’enjeu, pour les auteurs, est double : retranscrire la bataille, l’affrontement, le choc et les explosions, et – dans le même temps- laisser s’immiscer, comme une sorte de folie, le temps du rêve, et les shamans aborigènes. Freeman, au cœur de la bataille, sent sa raison vaciller, puis décide de suivre son instinct, de garder un pied dans cette autre réalité qu’est le temps du rêve. Le scénario concocté par Stéphane Antoni est, à cet égard très réussi, et ce premier album plante, efficacement et sans temps mort, un décor très élaboré. Le graphisme d’Olivier Ormière – d’un réalisme très photographique – est de la même force et parvient sans peine à rendre les explosions, les shrapnels, l’horreur des explosions ou du corps à corps. Cela fait de ce premier tome une vraie réussite, dont il faut espérer qu’elle saura trouver son public, hors du simple récit de guerre.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 19/09/2011 )
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