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Bande dessinéeet Manga  

Say hello to Black Jack (vol. 10) - Chroniques de psychiatrie (2)
de Syuho Sato
Glénat - Seinen manga 2006 /  6,50 €- 42.58  ffr. / 200 pages
ISBN : 2-7234-5184-4
FORMAT : 12,5x18 cm

Journal d’un fou

Ozawa tombe amoureux de Wendy. Ou quand la schizophrénie réunis deux paumés…
Ailleurs, plus tard. Un déséquilibré poignarde une dizaine d’élèves dans une école. C’est la curée médiatique, et la diabolisation aveugle d’une partie de la population : les malades mentaux. S’opère alors un dangereux amalgame entre crime et folie, les patients psychiatriques s’apparentant dans l’inconscient populaire à des potentiels assasins.

Sato maîtrise une fois de plus parfaitement son sujet, et apporte un éclairage passionnant sur une spécialité souvent laissée pour compte, parent pauvre d’une médecine techniciste qui ne s’intéresse qu’à la performance. Voici donc le lecteur plongé dans un univers avec ses règles et ses codes, ses méthodes de réinsertion, ses échecs, ses réussites. En mettant évidemment le doigt là où ça fait mal : cette autarcie psychiatrique tuerait-elle « toute velléité de sortie » chez des patients devenus dépendants aux soins, qui n’ont pour entourage que des compagnons d’hospitalisation ? Un fou ne peut-il finalement s’éprendre que d’un fou ?

C’est avec un trait d’une noirceur désespérée que l’auteur dénonce toute l’hypocrisie de notre société bien-pensante qui rejette poliment ses êtres « déviants » incapables de se couler dans le moule. Mais à cette tristesse blasée s’oppose parfois une rage explosive. Le tome met en effet en scène avec beaucoup d’intelligence l’imbécillité médiatique qui nous harasse chaque jour de faits divers futiles. Sato décrypte ainsi cette vaste blague qu’est l’information, mue par trois grands principes : l’indignation, la surenchère et la recherche de responsables. Tout ceci avec une bonne conscience déroutante qui élève l’anecdotique au rang d’événement et livre en pâture à un public avide de sensationnalisme des faits aussi sordides qu’insignifiants pour l’avenir du monde…

C’est non sans une certaine jouissance que la série montre du doigt une presse arrogante et manipulatrice qui souffle le chaud et le froid sur une population influençable. Et de jeter la pierre, dans le cas présent, aux professionnels qui jouent le jeu : « Des médecins, friands des feux de la scène, apparaîtront sur les plateaux de télé. Ces irresponsables disserteront sur la psychologie d’un homme qu’ils n’ont pas examiné »... Comme pour nous rappeler que ceux qui en parlent le plus sont souvent ceux qui en savent le moins.

Océane Brunet
( Mis en ligne le 31/03/2006 )
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