L'actualité du livre
Bande dessinéeet Réaliste  

Toute une vie (tome 1) - Sarah
de Claude Lelouch et Bernard Swysen
Soleil 2004 /  12.50 €- 81.88  ffr. / 47 pages
ISBN : 2845657935
FORMAT : 24 x 33 cm

Lelouch en BD

Le cinéma et la BD – 7e et 9e arts ont indéniablement une certaine proximité, que ce soit dans la nécessité d’un scénario, d’une mise en scène, de cadrages, voire d’effets spéciaux. Aussi peut-il sembler naturel qu’un réalisateur comme Claude Lelouch s’essaie à ce nouveau support. La tentative est à saluer, car elle est indéniablement originale : il ne s’agit pas de l’adaptation BD d’un film (ce qui n’a rien de neuf) mais bien une histoire (très lelouchienne) en bande dessinée. Les fans de Lelouch vont être servis : on y retrouve la plupart des thèmes favoris du cinéaste (l’amour, la mort, le destin, le hasard des rencontres et des événements, l’imbrication entre grande et petite histoires…).

Prologue. L’histoire débute de manière dramatique, par une sorte d’épidémie qui voit mourir des millions de nouveau-nés (rappelez-vous les plaies d’Egypte…) du fait de la folie humaine (ce qui permet au passage une salutaire dénonciation, trop vague, de la pollution et des responsabilités de l’humanité). Le progrès trouve là son impitoyable conclusion. Il s’ensuit une sorte de résumé couleur sépia de l’histoire du monde, où l’on s’attarde quelques instants sur la naissance, pendant la grande guerre et dans l’immédiat après-guerre, d’un garçon et d’une fille qui, sortis vivants de la Seconde Guerre mondiale et des camps de concentration, donnent naissance à une petite Sarah… fin du générique : l’histoire peut démarrer ! Et l’on y suit les destins pour l’heure séparés (la rencontre attendra le prochain album) de Sarah et de Simon. La première est une jeune fille riche, élevée par un père qui veut oublier avec elle l’horreur des camps et la mort de son épouse. Le second est un orphelin bientôt petit délinquant, que la prison va se charger de rééduquer… Se rencontreront-ils ? Que peut il se passer entre eux ?

On l’aura saisi à ce résumé, la réalisation ressemble vraiment à celle d’un film (du moins dans le découpage des séquences) et l’on a parfois l’impression de lire un story-board un peu amélioré plutôt qu’une BD construite dans les règles du genre. C’est un parti pris, mais il est finalement un peu maladroit. Le graphisme de Swysen ressemble également à un story-board : si le dessin est très classique (voire désuet malgré quelques trouvailles et un jeu sur la couleur dans le style des années 60), les cadrages sont peu soignés, trop convenus et n’exploitent pas vraiment les possibilités de la BD. Du reste, c’est surtout le scénario qui est guetté par les curieux comme par les fans, et son illustre auteur : encore une fois, c’est du Lelouch, et du conventionnel, et il faut aimer les films pour apprécier la BD. Les thèmes du cinéma de Lelouch sont à peine transfigurés par le traitement graphique, avec quelques phrases définitives sur les totalitarismes, le malheur, la bêtise des hommes… bref, tous les clichés habituels et un peu ronronnants d’un cinéaste qui ne se renouvelle plus. Tout cela n’est encore que du cinéma sur papier. Il faudra attendre la suite pour savoir si le scénariste saura s’adapter à son support et utiliser à plein les ressources de la BD pour une nouvelle jeunesse.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/12/2004 )
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