L'actualité du livre
Bande dessinéeet Réaliste  

Les Boules vitales
de Sylvain Ricard et Charles Masson
Futuropolis 2007 /  17 €- 111.35  ffr. / 128 pages
ISBN : 978-2-7548-0086-0
FORMAT : 19x27,5 cm

Toujours la même chanson

Ernest et Peggy se rencontrent et se plaisent. L’histoire d’amour commence tranquillement, passionnément, à la folie même, puis plus du tout ou presque. Lui est plutôt dragueur invétéré, terre-à-terre et même un peu lourdingue. Elle est plutôt branchée produits bios, thérapie par le rire et développement personnel. Et ce qui au départ n’est que divergence d’opinion se transforme peu à peu en grosses dissensions. Le fossé se creuse, chacun restant capricieusement du côté de son précipice, en regardant l’autre s’éloigner sans chercher à le rattraper. Les meilleurs amis sont convoqués, les disputent suivent les réconciliations et les petites piques fusent. Mais pas de compromis, ni de no man’s land amoureux dans cette romance jamais romantique.
Et pourtant, dans cet album (un peu trop) bavard, les argumentations de chaque côté ne manquent pas, chacun cherchant toutefois plus à asséner son point de vue qu’à convaincre l’autre. C’est le règne du « moi je » qui conclue de façon un peu insistante l’un des chapitres du livre. Et au bout du compte, le retour à la situation d’origine marque aussi bien l’aveu d’un échec que le point de départ pour une autre histoire qui, cette fois c’est sûr, sera la bonne.

Bref, c’est toujours la même chanson et en construisant leur récit au fil des saisons comme un cycle qui se répète, Sylvain Ricard et Charles Masson avouent implicitement le côté franchement routinier de cette affaire. La situation de départ, celle de n’importe quelle comédie américaine sentimentale, pouvait attiser la curiosité, mais l’album manque sévèrement de légèreté et de drôlerie pour finalement capter l’attention. Les personnages, réduits à n’être qu’une particularité sur pattes (lui baise, elle mange des veloutés froids de fenouil), semblent tous définitivement idiots et l’on a dès lors beaucoup de mal à s’intéresser à leur petite comédie humaine. On se doute que le but du livre est en partie justement de porter un regard assez ironique sur ces personnages de bobos gagas, mais en voyant leurs casiers respectifs se charger un peu trop, les pauvres silhouettes s’alourdissent au point de devenir franchement insupportables; et l’on ne cherche alors plus à savoir ce qui peut bien se cacher derrière ces visages un peu grossiers. Ajoutons que le robuste dessin de Charles Masson manque ici de la finesse nécessaire pour rendre cette ritournelle agréable, et peine malheureusement à rendre intéressants ces élans du cœur et du cul.

Une grande déception donc, comme un album qui manque sa cible et perd son lecteur en cours de route; promené entre une comédie douce-amère à la Truffaut et une fable narquoise façon Blier, on ne trouve finalement que quelques grincements de cœurs peu attractifs.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 08/09/2007 )
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