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Bande dessinéeet Fantastique  

Jour J (tome 8) - Paris brûle encore
de Jean-Pierre Pécau , Fred Duval et Damien
Delcourt - Neopolis / Série B 2012 /  14.30 €- 93.67  ffr. / 56 pages
ISBN : 978-2-7560-2480-6
FORMAT : 24x32 cm

Lendemains de révolution

Voilà quelques temps, on accusait – non sans quelques arguments, mais de manière excessive – mai 68 de tous les maux : la « chienlit » avait finalement fait son office et fragilisé la société française… Avec ce huitième tome de Jour J, intitulé « Paris brûle encore », c’est une version exceptionnellement pugnace de la « chienlit » qui est à l’œuvre. Qu’on en juge : la France connaît une guerre civile depuis une décennie, qui oppose « bleus » et « noirs » (pour simplifier, extrême droite et extrême gauche), et cela sous le regard atterré des nations unies. La France est occupée par les Américains, les Soviétiques, les Chinois et les Anglais, mais – toujours titulaire d’un siège au conseil de sécurité, elle s’obstine à interdire toute mesure de pacification. Et pourtant, il y a de quoi : la province est en ruine, les routes ne sont plus sûres, l’économie est revenue au troc et à la survie. Le conflit s’est fixé dans Paris et – au cœur des ruines – la guerre fait rage depuis une décennie. On est en 1979 et Oliver, un reporter de guerre chevronné, arrive – par Omaha Beach ! – dans la capitale, bien décidé à « couvrir » la guerre… à moins qu’il n’ait aussi d’autres idées en tête. Car des Champs-Élysées – dévastés – à un Sacré-Cœur devenu le cœur d’un affrontement entre punks armés et milices intégristes, Oliver cherche quelque chose de bien précis, et pour cela, il n’hésitera pas à déclencher une apocalypse au cœur de Paris.

Décidément, cette série illustre une fois de plus les charmes – ici modérés – de l’histoire alternative : tandis que le sixième tome livrait des lendemains de 68 une vision idyllique, ce nouveau récit en offre la version cauchemardesque. Dans tous les cas, la divergence est la même : la mort du général de Gaulle… mais ici, c’est une panique et une guerre civile qui s’impose, avec – cerise sur le gâteau – un missile nucléaire qui frappe la banlieue ouest, comme si la Commune s’était, un siècle après, finalement imposée aux Versaillais. Bref, une vision dystopique des lendemains de 68, à travers le regard d’un reporter américain et d’une punkette. Et comme de coutume, la réalisation est impeccable : scénario perlé de Pécau et Duval – qui ne se contentent pas d’un tableau du futur, mais y glissent une intrigue artistique et des éléments de référence à notre réalité, et un graphisme sobre, mais très efficace de Damien, particulièrement à l’aise dans le tableau des ruines parisiennes. La série garde le souffle des débuts, et ce nouvel album très réussi, à lire parallèlement au tome 6, est sans doute l’un des plus « dantesques » pour le lecteur français.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 09/06/2012 )
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