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Bande dessinéeet Fantastique  

La Danse du temps (vol. 3) - Les Trois Reines sans visage
de Igor Baranko
Les Humanoïdes associés 2006 /  12.90 €- 84.5  ffr. / 48 pages
ISBN : 2-7316-1791-8
FORMAT : 24x32 cm

Indiens sans cow-boys

Igor Baranko continue son exploration d’un continent américain vierge (ou presque) de tout envahisseur occidental. Voilà déjà deux albums que Quatre-Vents, un jeune sioux, se promène dans les couloirs du temps, bouleversant le destin d’un continent et des peuples indiens qui vivent dans une paix fragile. Pour sauver sa bien aimée, Lune-dans-les-nuages, reine des Pawnees, Quatre-Vents a changé le cours de l’histoire, mais, tel le voyageur imprudent de Barjavel, il s’est pris le pied dans la trame du temps et doit maintenant corriger ses erreurs (la mort de son beau-frère notamment). Dans ce nouvel opus, Quatre-Vents part à la rencontre des Iroquois, reclus dans une cité bizarre gouvernée par trois reines sans visage, masquées… Une situation étrange qui remonte encore une fois aux manipulations temporelles de Quatre-Vents. Et ce dernier est donc entraîné, malgré lui, dans un conflit politique larvé entre les trois reines, déterminant pour l’avenir de cette communauté sauvage.

Finis les grands espaces, place au confinement d’une cité iroquoise où, dans une ambiance mortifère, de traquenards en complots, de tentatives de séduction en coups fourrés, Quatre-Vents va devoir solutionner une crise dont on ne saisira qu’à la fin toutes les implications historiques. Si les deux albums précédents plantaient un décor complexe mais nécessaire, celui-ci relève plutôt du one shot, une excursion dans une société originale, une variation sur le thème du « roi caché ». Et on sent que Baranko se fait plaisir à imaginer ce palais-ville, encombré de passages secrets, de chausse-trappes, empreint d’une architecture baroque qui mélange allègrement le cyclopéen des forteresses andines, et le minimalisme d’un habitat asiatique. Perdu, comme le lecteur, dans ce palais comme dans ces conflits qui le dépassent, Quatre-Vents réagit, comme d’habitude, à l’instinct, fils de la plaine que des murs ne sauraient contenir. Le graphisme est toujours aussi original, onirique, l’auteur s’appliquant à figer les visages et les postures tout en révélant les tensions derrière les masques hiératiques des trois reines. Certaines planches relèvent même de l’expérience hallucinogène, et Baranko, d’un code de couleurs, sait distinguer le magique, le sacré, le réel. La fin, clin d’œil à l’expédition de Christophe Colomb, est encore plus intrigante… La suite s’impose.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 12/12/2006 )
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