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Bande dessinéeet Fantastique  

Terra inferno (tome 1) - La Montagne qui rêve
de Cristiano Fighera et Francesco Biagini
Soleil 2007 /  12.90 €- 84.5  ffr. / 48 pages
ISBN : 978-2849469026
FORMAT : 23,4x32,3 cm

Retour au mythe

Le monde en 1924 a bien changé : un monstre venu d’une autre dimension, haut comme une montagne et à peu près aussi attachant, est apparu dans le centre de Londres, bouleversant l’équilibre mental et l’intégrité physique de l’humanité. Depuis, pas un mouvement ni même un battement de cils : la bête dort. Restent les interrogations. Comment ? Pourquoi ?… Autant de questions sans réponse pour un genre humain uniquement préoccupé de survie. Désormais, les hommes se partagent entre ceux qui sont demeurés normaux et ceux qui, ayant mutés, ont épousé le culte de la bête et autres sectes apocalyptiques un tantinet violentes. La décadence de la société se manifeste à tous les niveaux, et les connaissances les plus simples disparaissent lentement. Nadia et Seth sont deux humains normaux : attirés par les trésors que peut contenir l’intérieur du monstre, ils s’aventurent sur ses flancs, montagne de chair, rêvant du monde d’avant, celui des « attomobiles » et d’une vie normale. Mais sur les flancs de la créature vivent les mutants les plus dangereux, les plus transformés, qui n’ont plus guère de lien avec leur ancienne humanité… Et au-delà, enfouis dans un paquebot fiché dans la bête colossale, se cache peut être le secret de cette créature. La magie toutefois semble apparue, et c’est Sparr, un vieux magicien, un homme de l’ancien temps, dandy cruel et puissant, qui part en quête de ce trésor, croisant alors la route de Seth et Nadia. Quel secret mystérieux se cache dans les entrailles du monstre ?

On dirait du Lovecraft, mais un Lovecraft retravaillé avec une esthétique surréaliste qui oscille entre Dali, Giger et Jérôme Bosch dans des tons un peu douceâtres, un rose chair écoeurant. La bête immense, « cosmique », qui apparaît sans raison et provoque ruine et folie semble tout droit sortie des fantasmes du maître de Providence. Chaque monstre, chaque créature – tassement de chair, de dents, de cornes, de griffes sans grande cohérence – aurait sa place dans le mythe lovecraftien… On reconnaît vaguement un corps, des bras, des jambes, mais guère plus : Biagini a recréé sa propre ménagerie diabolique, haute en couleurs et franchement inhumaine. Du reste, la couverture même témoigne déjà d’une inspiration revendiquée. Si graphiquement, on s’étonnera parfois de quelques effets pas toujours heureux (dans les contrastes entre les tailles des humains), l’ensemble se lit comme un hommage réussi à un univers fantastique riche et parfois oublié. Une variation inattendue et prometteuse, dont on attend maintenant la suite, et l’apocalypse promise pour le réveil du dieu.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 10/09/2007 )
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