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Bande dessinéeet Fantastique  

Le Manoir des murmures (tome 1) - Sarah
de David Muñoz et Tirso Cons
Les Humanoïdes associés 2007 /  12.90 €- 84.5  ffr. / 64 pages
ISBN : 978-2-7316-1994-2
FORMAT : 24x32 cm

Couleurs: Javi Montes

Vampire academy ?

Sarah, 10 ans, mignonne petite rouquine aux grands yeux mélancoliques et aux longs cheveux bouclés … un amour, enfermé dans un manoir lugubre en Tchécoslovaquie, en 1949… Vraiment, les adultes sont des monstres ! Certes, la petite a du caractère et ne s’en laisse pas conter, bien décidée à percer les mystères de ce Manoir des murmures sinistre, où des voix résonnent dans la nuit, où des enfants disparaissent, où les adultes – terrifiés et agressifs – se méfient de vous, où chaque promenade est faite encadrée par des soldats armés. C’est vrai qu’elle est un peu bizarre, cette Sarah : elle entend des voix, se remet d’une chute qui aurait du la briser… Accompagnée de ses deux compagnons de misère, Yan et Milos, elle échafaude même un plan d’évasion un peu naïf… Le monde des adultes est cruel, mais vous n’avez pas vu Sarah quand elle se transforme, la nuit venue !

Et une nouvelle variation sur le mythe du vampire avec – artifice scénaristique habile mais déjà-vu – le thème de la beauté du diable, sous les traits de l’innocence. Dans la foulée de l’Ana Anslea de Je suis Légion (Nury et Cassaday, également aux Humanos), Sarah attire la sympathie, la compassion et très efficacement, Munoz et Tirso ont su, tant par le graphisme que par les dialogues, apitoyer le lecteur en lui soufflant des rumeurs de virus nazi frappant des enfants innocents. On se souvient peut-être de la petite fille vampire de Entretien avec un vampire : même piège sous une apparence candide. Le ressort, pour connu, est efficace, et l’album se parcourt d’une traite.

De fait, le résultat est captivant à tous les points de vue : scénario bien monté, et le lecteur tombe facilement dans les nombreux pièges de l’intrigue, jusqu’au dénouement – temporaire et prometteur. Un constat : les vampires ont la peau dure, même dans l’Europe de la guerre froide (marrant d’ailleurs comme les dictatures inspirent les récits de vampire… une allégorie du dictateur ?). Mais c’est surtout le graphisme qui frappe : l’album se déroule majoritairement la nuit, et, jouant avec les ombres et les ambiances nocturnes, Tirso livre un conte fantastique sombre, une version gothique d’Harry Potter, autour d’enfants qui se découvrent en prédateurs. La couverture même, comme inspirée de l’affiche de Damien, la Malédiction, résume l’ambiance de la série : l’art des contrastes entre les touches lumineuses et les longues plages monochromes, un dessin séduisant, aux influences multiples (manga et comics…). Une série des plus prometteuses qui fait un beau pendant à Je suis Légion.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 03/12/2007 )
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