Bande dessinée Science-fiction |
Karma City (tome 2) de Pierre-Yves Gabrion Dupuis 2019 / 20.95 €- 137.22 ffr. / 164 pages ISBN : 978-2800168623 FORMAT : 17,7x24,3 cm Bad karma On retrouve Kate Cooper et Napoli, les deux inspecteurs de Karma city, cette cité future où chaque action est directement évaluée à l’aune du karma, et donc récompensée/sanctionnée dans l’instant. Un monde apparemment idéal, où la morale individuelle est garantie par une technologie collective. Mais une société qui n’échappe pas au crime et qui suppose donc que les deux héros enquêtent. Ils sont toutefois dans une situation un peu délicate : le premier tome les avait emmené hors de la cité, dans une sorte de Far West, à enquêter sur quelques trafics archéologiques. Mais l’enquête, qui croisait d’autres problèmes de Karma city (une épidémie d’AVC), débouche sur une affaire bien plus inquiétante, un complot qui menace les fondements même du système. Ce second tome les retrouve dans les égouts de la ville, traqués par la milice, en indéniable mauvaise posture après avoir pris contact avec un groupe séditieux. Fuite, enquête complot et au passage, une IA qui a entrepris de s’émanciper de la tutelle humaine. Mais l’inspecteur Napoli n’a pas seulement un passé compliqué, qui resurgit ici, il a aussi de la ressource et des moyens de passer outre la loi karmique pour sauver la cité… Ajoutons à cela des complots au sein du complot, des chefs moins karmiques que prévus, et on découvre, avec ce second tome, la réalité de Karma city, un monde à l’orée d’une guerre civile et d’une destruction au nom de la liberté (mais laquelle ?). Le vieux dilemme sécurité ou liberté n’a jamais été autant d’actualité, au pays des citoyens responsables ! Le premier tome de Karma City nous entraînait dans une utopie singulière, une cité réglée sur le karma et donc une sorte d’idéal à la fois libertaire et responsable, où chacun était immédiatement évalué à l’aune de ses actions. Les héros découvraient toutefois les coulisses et les marges de ce monde très (trop) normé, et mettaient à jour un complot, mené par un groupe d’opposants nommés les alchimistes, et convaincus que la libération du peuple passait par d’autres voie. Avec ce second tome qui achève le diptyque, l’utopie se transforme en une dystopie bien réelle, une dictature gentiment rationnelle, aimablement scientifique et technologique… mais une dictature. Ce second tome approfondit, ô combien, les problématiques du premier et nous ouvre à des considérations bien plus vastes encore, sur le transhumanisme, sur les IA et la singularité, sur l’homme et son libre arbitre comme caractéristique importante (ou pas) de son humanité. En suivant l’histoire d’une IA qui s’affranchit de ses maîtres et d’une humanité qui se cherche un maître juste qui serait une sorte de dieu accessible, Pierre-Yves Gabrion surfe sur de nombreux thèmes sans jamais perdre en cohérence. L’intrigue, parfaitement menée, est servie par un graphisme toujours aussi séduisant, un peu vintage (jusque dans les couleurs) et qui va joliment avec cette anticipation aux couleurs sépia. Un diptyque très réussi, très maîtrisé, et une SF avec du souffle qui fait honneur au genre. Pour tous ceux que le meilleur des mondes questionne et inquiète. Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 09/12/2019 ) |
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