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Bande dessinéeet Science-fiction  

Dayal de Castaka (vol. 1) - Le Premier Ancêtre
de Alexandro Jodorowsky et Das Pastoras
Les Humanoïdes associés 2007 /  12.90 €- 84.5  ffr. / 56 pages
ISBN : 978-2-7316-1762-7
FORMAT : 24x32 cm

Familles, je vous aime…

Rarement un héros de bandes dessinées (et encore, plutôt un personnage secondaire qu’un véritable héros) aura eu une telle postérité : le Méta-Baron qui s’invitait naguères, un peu violemment, dans l’existence déjà compliquée de John Difool dans le très délirant et incontournable Incal (toutes couleurs confondues), est le rejeton d’une longue lignée de guerriers à la sauce samouraï (leur code d’honneur s’appelle le bushitaka… tout un programme) dont les vies nous sont désormais bien connues. De fait, peu de scénaristes auront tant fait pour la généalogie de leur héros… Avec Gimenez, Jodorowsky avait en effet donné à notre guerrier préféré une ascendance et des aïeux dignes de lui. Dans la famille Méta-Baron, que ce soit le père, la mère, le grand-père ou le cousin germain, chacun est unique, résultat d’une sélection à la fois génétique et morale, dont le rituel ultime est l’exécution d’un être cher, après l’ablation d’un organe… du guerrier pur et dur, qui sait que la victoire a forcément un prix. Mais voilà, Jodo et Gimenez ayant retracé toute la généalogie des Méta-Barons, les fans commençaient à se sentir en manque de cet univers SF violent et baroque, marqué par des avancées technologiques, des sectes délirantes (comme l’église Pan-Techno), des extra-terrestres bizarres, des mondes étranges… Bref, un univers sorti de l’imaginaire de Jodorowsky. Alors avant les Méta-Barons, il y eut les Castaka… Et c’est reparti pour un tour. Heu-reux !

Avec la série Dayal de Castaka, on arrive à la source des Méta-Barons, à commencer par la planète mère : Marmola. Enfin, le lecteur va savoir d’où provient cette lignée de guerriers solitaires et nomades… Et sur cette planète vit une société féodale formée de deux clans - les Amakura et les Castaka – qui s’affrontent perpétuellement, tant pour la victoire que pour la beauté du combat. Les lois de la guerre et de l’honneur (le bushitaka des Castaka ou le Bushikara des Amakura) sont sévères, mais elles mènent ce monde jusqu’au jour où Omezo de Castaka décide de les violer en représailles du rapt de son épouse par Divadal d’Amakura. De cette transgression originelle naîtra Dayal de Castaka, fils de Divadal d’Amakura et de la reine des Castaka, prince et bâtard, haï par son père, élevé dans la haine et l’amour de la guerre, dernier mâle fertile de sa planète, premier ancêtre officiel du Méta-Baron et dernier Marmolien en vie à la fin de l’album...

Un constat s’impose d’emblée, tant pour le graphisme de Das Pastoras que pour le scénario de Jodorowsky : le souffle de la série est intact, que les fans se rassurent. L’ambiance est toujours aussi délirante, l’intrigue aussi tortueuse, mélange de mythes originels (l’enlèvement des épouses et le bâtard, héritier de deux royaumes, sont des classiques), d’esprit samouraï (l’esthétique japonaise de Das Pastoras, version futuriste, est très réussie), de clins d’œil SF (Darth Vador / Pan Techno, même combat ?). On se laisse facilement entraîner dans ce récit de batailles furieuses, de trahison, sur cette planète aride de marbre coloré, faite pour la guerre. Le froid et l’obscurité sidérale sont encore loin et l’on apprécie d’être pour une fois sur le plancher des vaches, entre humains, à se battre à l’ancienne, au sabre et à la hache… Bon sang ne saurait mentir, il est vrai ! Das Pastoras s’est vraiment coulé dans le moule de Gimenez, au point que l’on se demande parfois si le dessinateur a changé : le graphisme, impeccable mélange de réalisme et d’un zeste de fantastique, ne décevra pas les fans, qui retrouveront également un parfait travail des couleurs, notamment pour les visages et la peau, ainsi que pour les ombres portées. On rechausse donc avec plaisir les bottes du Méta-Baron pour visiter son arbre généalogique. Quant au scénario de Jodorowsky… que dire qui n’ai pas été dit sur ce scénariste génial et fou ? Pour résumer, disons que c’est du Jodo, et du bon !… Avis aux amateurs, aux orphelins de la lignée des Méta-Barons, à tous les fans d’univers médiéval-futuriste déjanté et d’intrigue torturée… Bref, une famille à découvrir ou à redécouvrir…

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/04/2007 )
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