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Bande dessinéeet Chroniques - Autobiographie  

La Voix des hommes qui se mirent
de Gilles Larher et Sébastien Vassant
Futuropolis 2009 /  22 €- 144.1  ffr. / 192 pages
ISBN : 978-2-7548-0231-4
FORMAT : 19x27,5 cm

Moderne solitude ?

On se souvient du tandem Larher/Vassant pour leur premier album au titre improbable mais au rendu très réussi, L’Accablante Apathie des dimanches à rosbif. Un livre drôle, émouvant, profond à tous les points de vue, et qui laissait des traces chez son lecteur…. Et faisait naître un phénomène d’attente aussi, en plaçant la barre assez haut. Avec La Voix des hommes qui se mirent, même combat, mais dans un style plus léger, plus soft. Le talent est toujours là et le charme, persistant, renouvelé par une ambiance bizarre, équivalent masculin de la chick-lit (la littérature de filles : essayez Agnès Abécassis pour saisir le genre). Pas de comique en déroute cette fois-ci, mais des hommes, qui se confessent aux auteurs… Dans tous les sens : depuis Massimo, l’agent commercial qui vient de louper la femme de sa vie et la croise au bras d’un autre dans un supermarché, jusqu’à un mystérieux « anonyme », qui va faire une découverte avant la fin de l’album…

Des histoires d’hommes et des histoires d’amour, réussies ou ratées, des gens heureux ou malheureux, seuls ou à deux… mais un univers masculin, qui oscille entre le cliché (la bande de copains mateurs de culottes et grands philosophes de l’inconstance féminine) et la vraie vie, la réalité de tous les jours, celle de ces foules sentimentales qui, tous sexes mélangés, cherche à tromper la solitude. Alors on croise des amoureux déçus, des amoureux transis, des amoureux satisfaits, inquiets, étonnés, charmés, bouleversés, discrets ou diserts… Chacun a sa petite histoire, son anecdote dérisoire dans laquelle le lecteur peut se retrouver, et finit par se retrouver. Entre celui qui, un soir de dispute, découvre qu’il aime sa femme, à celui qui voudrait collectionner les culottes de ses ex au nom d’un souvenir canin, celui qui se voit en Poulidor du vagin et qui voudrait, rien qu’une fois, être un Eddy Merckx, celui qui rêve de reconstituer chimiquement le goût d’un téton, celui qui est tombé amoureux du canapé décati de son ex, celui qui rate la femme de sa vie à cause d’une feuille de salade… Tous ces gens qui, un jour, se sont heurtés à l’amour. Le style, comique discret et en sympathie, de Gilles Larher, fait toujours mouche, d’autant que dans un jeu avec Sébastien Vassant, les deux auteur distinguent une première partie, de présentation sous forme de confession filmée qui détourne les codes de l’interview pour les adapter à la bande dessinée, exploitant le gros plan ou l’état des vignettes, comme une mise en abyme faite avec humour. Graphisme sobre, mais pas froid : Sébastien Vassant va à l’essentiel, sans réduire ni croquer ses personnages. Chacun a une profondeur, une existence. On ressort de cet album parfois un peu nostalgique, on se retrouve dans quelques réflexions, dans quelques mésaventures : Larher et Vassant ont inventé, en BD, un genre original, l’humour grave… Une réussite et la confirmation d’un vrai talent complémentaire.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 07/04/2009 )
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