Bande dessinée Chroniques - Autobiographie

Marx de Anne Maier et Anne Simon Dargaud 2013 /  14.99 €- 98.18  ffr. / 64 pages ISBN : 978-2-205070910 FORMAT : 22x30 cm Mouarx… « Un spectre hante l’Europe, c’est le spectre du communisme ». Mais si, tout le monde l’a lue, cette phrase … Classe de philo, Le Manifeste du Parti Communiste. En général, sur les éditions figurait un portrait de Marx, barbe broussailleuse de philosophe, le personnage le plus éloigné possible du héros de bande dessinée, son antithèse, l’inventeur d’une pensée rapidement détournée, sclérosée, soumise à interprétations ou utilisée pour opprimer des millions d’individus. Et en même temps, on se souvient de ce manifeste, de ce raisonnement élégant sur l’Histoire et son sens, de la séduction d’une jolie théorie écrite d’une plume habile, de l’art des formules pour désigner des choses parfaitement oubliées (qui se souvient des socialiste utopiques, pourtant folkloriques ?). En général, le professeur mettait un peu de contexte là dedans, la révolution industrielle, le monde ouvrier, le paupérisme, Germinal, la Révolution de 1848, la Commune et finalement, la séance restait dans les esprits... plutôt que ce gros barbu à tête de Père Noël triste. Karl Marx est une icône : comme Che Guevara, sa photo écrase sa vie, son histoire voire même ses idées. Il suffit de s’en réclamer, sans forcément saisir sa pensée ni en comprendre la dimension hypothétique. Marx est un philosophe, qui affirmait ne pas connaître les marmites de l’avenir. Alors on peut revenir sur l’auteur du Capital, non pas déboulonner la statue ou la repeindre, mais juste envisager le bonhomme et son destin, essayer de comprendre le sens de cette pensée et en évaluer la portée immédiate. C’est le projet de cette biographie scénarisée par Corinne Maier et illustrée par Anne Simon. Karl Marx version BD : forcément, on simplifie, on écourte, on fait dans le consensuel… Si vous cherchez une version abrégée, ou dessinée, de la philosophie marxiste, passez gentiment votre chemin, l’enjeu de cet album n’est pas là. Il s’agit plutôt d’une biographie, un peu espiègle, du philosophe, un savant mélange de pensée (pas trop, c’est compliqué), d’instants de vie (Jenny, Engels, l’Internationale, etc.) et d’allusions dessinées à l’avenir marxiste, selon le principe que la postérité de Marx va bien au delà du personnage, finalement très bourgeois et daté dans son mode de vie. Corinne Maier n’a pas tranché entre philo et histoire et ce n’est pas plus mal. Certes, l’album manque un peu de profondeur, s’avère parfois un peu manichéen ou partisan, mais il se rattrape en légèreté. Et cette légèreté, elle est notamment due au trait joliment naïf d’Anne Simon, qui joue du personnage, de son mythe et de ses idées pour l’enfermer dans son Capital, lui mettre une cape de super héros, le coincer dans une équation ou illustrer – assez pédagogiquement – ses idées. Et c’est peut être là l’élément le plus abouti de cet album : la tentative de donner du marxisme une traduction graphique, sans s’appesantir trop sur le décor, le contexte, le détail. Un Marx, version comic strip en somme : la rencontre n’était pas évidente, mais elle a sa cohérence. Ce Marx est plaisant, pour un lecteur qui ne cherche pas de la philo en bande dessinée, mais de l’histoire, des idées, et un peu de fantaisie dans ce monde de brutes (capitalistes). Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 24/06/2013 )

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