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Bande dessinéeet Chroniques - Autobiographie  

Persepolis (tome 4)
de Marjane Satrapi
Association - Ciboulette 2003 /  15 €- 98.25  ffr. / 100 pages
ISBN : 2-84414-137-4
FORMAT : 16,6 x 24,4 cm

De Marji à Marjane

Le coup de maître réalisé par Marjane Satrapi avec Persepolis est d’avoir su, sur la longueur, passionner ses lecteurs en mêlant la petite histoire et la grande. Pourtant, personne ou presque ne connaissait cette dessinatrice qui a commencé, en 2000, à nous parler de son enfance, qui plus est dans un pays relativement mal connu du public français, l’Iran. Tous les ingrédients pour intéresser un lectorat minimal, en somme ! C’est exactement l’inverse qui se produisit : prix du Lion pour le tome 1, prix Alph-Art du scénario pour le tome 2, Persepolis a créé l’événement jusqu’à symboliser une certaine « nouvelle école » de la bande dessinée.

Chez Satrapi, le noir et blanc sans nuances, le minimalisme voire l’absence des décors, ont pour effet de mettre en valeur la narration en elle-même. Marjane Satrapi nous « raconte » une histoire, telle une conteuse, et la dessinatrice préfère parfois mettre en scène ses images mentales plutôt que d’illustrer une réalité objective. Il en ressort un ton très personnel et attachant, plein d’humour et d’émotion, qui ne s’est pas démenti au long des quatre tomes (près de 400 pages au total, tout de même).

Dans le premier volet, la petite Marji, dix ans, livrait sa vision d’enfant de la révolution islamique qui a bouleversé l’Iran en 1979. Ce tome et le suivant décrivent, mieux qu’aucun cours d’histoire, la vie à Téhéran dans ces années troubles. Dans le troisième tome, on retrouve Marji adolescente à Vienne, quittant «l’Iran religieux pour une Europe laïque», punk et découvrant l’amour. Dans ce dernier volet, de retour à Téhéran après quatre années autrichiennes pas toujours faciles, Marjane a grandi et réapprend à vivre avec les siens. Etudes d’arts graphiques à l’université (ce qui donne quelques anecdotes à la fois cocasses et effrayantes, comme ce modèle du cours d’anatomie entièrement voilé !), passage à l’âge adulte et mariage à vingt et un ans, puisque pour connaître quelqu’un, il faut bien vivre avec lui et que le mariage est le préalable nécessaire à la vie à deux… Poussée par ses parents, qui n’ont de but que d’apprendre à leur fille la liberté et l’ouverture d’esprit, Marjane finira par décider de partir en France, seule, pour faire l’école des Arts déco à Strasbourg… et devenir ce que l’on sait.

Très loin du narcissisme, Persepolis est une œuvre intelligente, drôle, humaniste. Une belle leçon de vie aussi.

Anne Bleuzen
( Mis en ligne le 29/09/2003 )
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