L'actualité du livre
Bande dessinéeet Chroniques - Autobiographie  

Les Aventures d'Hergé
de José-Louis Bocquet , Jean-Luc Fromental et Stanislas
Reporter 2007 /  16 €- 104.8  ffr. / 72 pages
ISBN : 978-2-908710-45-8
FORMAT : 22,5x30 cm

Un gamin de Bruxelles…

On n’a jamais fini de découvrir Tintin. L’œuvre reste aujourd’hui encore d’une importance majeure et ne cesse d’encourager rééditions, exégèses, expositions, projets de films et toute autre dérive de produits. S’il n’y aura –a priori- jamais de nouvelles aventures du petit reporter qui ne manque pas de toupet, le mythe n’en est pas moins toujours aussi imposant, et la figure de Tintin reste emblématique et culturellement inusable. Hergé, fils de Tintin donc, a fort logiquement conduit tous les examinateurs à s’intéresser à son cas : on catalogue son impressionnant travail, on raconte sa vie, on pioche dans le passé et l’on déterre quelques secrets de famille ou faits remarquables qui pourraient « expliquer » l’œuvre. Si l’homme a passé la majeure partie de son existence enchaîné à son personnage, il n’en reste pas moins que sa vie « d’à côté » peut s’avérer pertinente et pleine de surprises, à défaut d’être aussi extraordinaire qu’une aventure aux confins du Tibet ou sur la Lune.
Le genre est connu, ainsi Dashiell Hammett, Shakespeare et aujourd’hui Molière sont les héros de récits (cette fois cinématographiques) dans lesquels ils vivent des péripéties plus ou moins extraordinaires qui influencent leur création future. Au lecteur/spectateur de s’amuser à repérer quelques références plus ou moins cachées… Avec Les Aventures d’Hergé, le trio Bocquet, Fromental et Stanislas, décide de la même manière de donner le premier rôle à Georges Rémi, et d’égrener dans cet album quelques moments forts de son existence. Avec Winsor McCay et la très belle série écrite par Smolderen et Bramanti, voilà donc un nouveau grand maître de la bande dessinée qui passe de l’autre côté des cases et acquiert le noble statut de silhouette de papier.
En dix-huit petits épisodes, voilà donc un portrait d’Hergé très largement brossé – on n’est pas dans la biographie précise et complète mise en images- de son enfance aux alentours de 1914 à sa mort en 1983. Chaque tableau dépeint une période précise, revient sur quelques moments clés et décrit parfois une simple anecdote. Ainsi, on retrouve le petit Georges, enfant turbulent que seul le crayon et une feuille de papier parviennent à calmer. Puis c’est le boy scout, renard curieux et jeune homme fier. Viennent ensuite l’âge de gloire grâce à Tintin, la psychanalyse, les femmes, la peinture, les retrouvailles avec Tchang… Plusieurs anecdotes sont déjà connues des lecteurs comme lorsque Hergé et Edgar-Pierre Jacobs sont en repérages pour Les Sept Boules de cristal et, sans le savoir, choisissent comme décor une demeure réquisitionnée par les nazis. D’autres récits resteront opaques aux moins tintinophiles comme cet attentat sur la personne de Hergé déjoué dans l’ombre par quelques étudiants chinois… L’épisode se lira avec autant de curiosité que rien n’est ici expliqué. C’est d’ailleurs le reproche que l’on pourrait faire à cet album qui semble constamment hésiter sur sa position et reste comme entre deux eaux. À la fois d’une grande fantaisie qui permet une relecture originale de l’oeuvre d’Hergé (d’autant que les références graphiques et ludiques sont nombreuses), le livre apparaît en même temps comme une curieuse chronique pleine de blancs, de grands vides entre deux dates, de non-dits dommageables (quelques événements et amitiés suspectes restent ainsi soigneusement éludés) et de précisions qui ne parleront qu’aux plus avertis. Les saynètes se suivent ainsi sans véritable lien, montrant des morceaux de vie et, au bout du compte, l’ouvrage ne parvient jamais à acquérir une réelle cohérence. L’ajout de deux récits à cette nouvelle édition prouve d’ailleurs bien que l’album reste en constant devenir.
Le livre se lit toutefois sans aucun ennui et, brillamment servi par les dessins de Stanislas, il est d’une grande qualité. Si la ligne est claire, elle reste pointue et sèche et l’on pense plus ici à du Swarte ou même Ever Meulen qu’à du Hergé. En cette année 2007 où l’on fête le centenaire de la naissance d’Hergé, voilà donc un agréable hommage à une œuvre universelle et d’une grande richesse.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 06/02/2007 )
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