L'actualité du livre
Bande dessinéeet Policier - Thriller  

Blacksad (tome 4) - L’Enfer, le silence
de Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido
Dargaud 2010 /  13.50 €- 88.43  ffr. / 56 pages
ISBN : 2205063138
FORMAT : 24x32 cm

Cat Blues

Après le noir, le blanc, et le rouge voici l’album bleu, l’album blues : « L’Enfer, le silence », quatrième volume des enquêtes de Blacksad, détective privé à tête de chat, grand succès – mérité – des librairies et toujours très attendu des fans.

Cette nouvelle aventure conduit le héros félin à la Nouvelle-Orléans, pendant le carnaval du Mardi-Gras. John Blacksad vient d’être engagé par Faust Lachapelle, producteur de musique, pour retrouver le célèbre pianiste Sebastian « Little Hand » Fletcher. Malgré un bras atrophié, Fletcher reste l’un des plus grands jazzmen de l’époque – Blacksad avoue d’ailleurs posséder tous ses disques – hélas, l’homme est aussi sérieusement accro à l’héroïne.
L’enquête conduit Blacksad à croiser plusieurs personnages, tous cachant quelques lourds secrets derrière leurs gueules d’animaux mal léchés. Après le monde des beatniks et d’une certaine classe arty-intellectuelle snob du précédent épisode, cette virée dans le monde du jazz possède une belle force d’évocation. Les silhouettes que l’on rencontre ici ont le blues dans l’âme, une certaine détresse impossible à évacuer sans l’aide d’une béquille, quelle qu’elle soit (la musique, la drogue, les rites vaudous…). Sebastian Fletcher, l’homme à retrouver, est particulièrement bien campé : génie maudit du piano, artiste à qui la vie ne sourit pas, homme brisé et déçu, avec sa tête de bouledogue triste voilà un personnage d’une belle épaisseur.

Pour cette série, les auteurs ont ingénieusement réussi le mariage entre bande dessinée animalière et le classique polar américain : Blacksad c’est du grand spectacle mâtiné d’une ambiance toujours très noire, souvent pessimiste où l’âme humaine ne saurait trouver meilleure incarnation que celle de cette animalité féroce et sans pitié. Le personnage-titre est l’emblème même de cette sauvagerie ambiguë, à la fois brute et protecteur, justicier impulsif et observateur de ses contemporains. Ici, il cite même Sartre pour commencer. On a connu détective privé moins lettré…

Comme dans les meilleurs polars, l’intrigue est ici encore joliment tordue et la narration s’amuse des flashbacks imbriqués, pas toujours faciles à déceler du premier coup d’œil d’ailleurs.
Et puis il y a ce dessin, forcément premier responsable du succès de la série. Guarnido n’a pas ses pinceaux dans sa poche et une fois de plus il en met plein la vue. Mise en scène inventive, ambiance marquée, richesses des expressions (on retrouve bien là, derrière ces figures animales aux faciès expressifs l’ancien animateur de chez Disney), sens de la couleur et de la lumière, soin apporté aux décors jusque dans ses moindres détails, découpage dynamique… Tout est toujours parfaitement travaillé et il faudrait être de très mauvaise foi pour ne pas reconnaître le talent généreux du monsieur.

Ce dernier volume, aussi réussi et prenant que les précédents, met aussi, discrètement, en avant une nouvelle intrigue évoquant l’enfance de Blacksad. À suivre, on s’en doute dans un cinquième épisode déjà prévu. Encore une bonne nouvelle.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 27/09/2010 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024



www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)