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Bande dessinéeet Aventure  

Les Innommables (tome 12) - Au sud-ouest de Moscou
de Yann et Conrad
Dargaud 2004 /  12.60 €- 82.53  ffr. / 60 pages
ISBN : 2871296723
FORMAT : 24 x 32 cm

Affreux, sales mais pas méchants !

Les Innommables, ce n’est pas une série, c’est une saga, une odyssée, relativement inclassable, qui, dans ce douzième tome (« Au sud-ouest de Moscou ») persiste dans le mauvais goût, l’humour potache, ou douteux, le politiquement très incorrect, j’en passe et des pires… Bref, un must pour tout amateur d’humour fin et délié, et d’aventures picaresques.

Nous sommes dans les années cinquante, aux États-unis (période faste pour les droits de l’homme et la liberté d’expression). On retrouve nos pieds nickelés (Mac et Alix en spécialistes du Kama sutra, Tim et son cochon Raoul, Tony, homo amoureux déçu) dans le désert du Nouveau Mexique (célèbre entre autres pour ses atterrissages d’extraterrestres), aux prises avec – dans le désordre – des nazis de la Nasa qui veulent bombarder Moscou, des shérifs en quête de kidnappeurs, une prêtresse égyptienne et ses domestiques-embaumeurs, des mexicains à moitié demeurés et le chef d’une secte aux discours très scientologiques… On y découvre même l’origine du virus du sida. Trouver une once de vraisemblance dans les aventures délirantes de nos héros est une gageure, mais également un plaisir renouvelé (on parle d’ailleurs beaucoup de plaisir dans cette série, et des divers moyens de s’en procurer). Les personnages, bizarrement attachants, sont rien moins que lisses : caractériels, obsédés, déterminés, pragmatiques ou juste niais, ils ont tous un grain.

Les amateurs – adultes de préférence - des Innommables ne seront, comme d’habitude, pas déçus : une fois de plus l’infernal duo de Yann (au scénario) et Conrad (au dessin) fait des siennes et s’attaque, pêle-mêle, à la Nasa et à ses transfuges du nazisme (évoquant le programme Paperclip, qui permit notamment le sauvetage de Werner von Braun, le père des V2 et de la conquête spatiale américaine), aux sectes américaines – y compris les plus allumées (en particulier la scientologie, évoquée dans le texte à travers son fondateur, Ron Hubbard, et ses visions) ou encore au psychologue Bruno Bettelheim (l’auteur de La psychanalyse des contes de fées). Le tout avec un humour décapant et jubilatoire, vaguement parodique (la couverture ressemble d’ailleurs à celle d’un album de Blake et Mortimer, L’énigme de l’Atlantide). Du reste, les auteurs ont des références : après avoir été remercié par le Journal de Spirou (du fait d’un humour peu adapté au lectorat), ils se sont illustrés dans quelques belles séries (notamment Pin-up et Yoni, pour Yann). L’album est extravagant, libidineux (le pauvre Mac est affligé d’une crampe que seule la belle Alix saurait réduire) et n’hésite jamais devant une situation un peu limite. On en redemande !

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/12/2004 )
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