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Bande dessinéeet Aventure  

Tigresse Blanche (tome 4) - Une espionne sur le toit
de Conrad et Wilbur
Dargaud 2007 /  11 €- 72.05  ffr. / 45 pages
ISBN : 978-25050011461
FORMAT : 22,5x30 cm

Shanghaï, nid d'espions

La Chine, dans les années 40. La guerre civile oppose les nationalistes de Tchang Kaï-Chek aux communistes de Mao. Shanghai est le théâtre d'un lutte invisible mais acharnée entre les agents secrets de tous bords et de tous pays. Tandis que Tai Li, le chef des services secrets du Kuomintang, vient d'orchestrer la mise en scène de sa propre mort, les agents communistes s'intéressent vivement aux agissements de T. V. Soong, ministre des finances de Tchang Kaï-Chek. C'est pourquoi Alix Noni-Tengu, espionne de Mao et membre de la redoutable triade de Tigresses Blanches, est chargée par sa hiérarchie de devenir la maîtresse de Soong. La belle ne sait pas encore dans quel sac de noeuds elle s'apprête à mettre les pieds...

Pour Alix, il y a désormais une vie avant Les Innommables. Spin-off de la série culte de Yann et Conrad (interrompue pour l'occasion), Tigresse Blanche s'intéresse au passé de la jolie espionne chinoise, alors qu'elle n'était encore qu'une apprentie « mouche-qui-pique », c'est-à-dire une tueuse des services secrets communistes. Après deux albums écrits par Yann, Conrad a repris en main la série avec Wilbur, son épouse et co-scénariste régulière (Le piège malais, Donito, ou plus récemment Raj).

Pour ce quatrième épisode, les auteurs nous entraînent dans une histoire d'espionnage à mi-chemin entre Ian Fleming et Le Lotus Bleu : « Une espionne sur le toit » est un album au parfum exotique, peuplé d'espions internationaux, d'agents doubles et de politiciens retors. L'intrigue est complexe et très documentée, mais elle ne perd jamais le lecteur en route, pour peu que celui-ci y mette un peu du sien. Le contexte historique (la naissance de la guerre froide vue d'Extrême-Orient) est passionnant (et largement méconnu).

Si le tome 3 pouvait être considéré comme un album de transition (la participation de Wilbur n'y était d'ailleurs que discrètement mentionnée), celui-ci affiche clairement son changement de ton : plus réaliste et plus « grand public ». L'humour parodique, le cynisme féroce et les clins d'oeil sexuels appuyés qui caractérisaient les albums écrits par Yann ont quasiment disparu. Certains fans des Innommables se sentiront peut-être trahis, mais les autres apprécieront que Conrad et sa compagne aient enfin ouvert les fenêtres d'un univers qui commençait sérieusement à sentir le renfermé.

Graphiquement, le dessinateur continue d'animer la belle Alix avec la même virtuosité, même si son trait semble s'être légèrement assagi pour rester en phase avec le scénario (l'influence de Raj, série qu'il illustre dans une manière plus « ligne claire », y est peut-être aussi pour quelque chose). Conrad est, comme toujours, particulièrement à l'aise dans les scènes d'action, d'un dynamisme époustouflant.

Avec cet album, la Tigresse Blanche s'émancipe définitivement des Innommables, et s'affirme comme une série séduisante et pleine de promesses. Même si les nouvelles aventures d'Alix peuvent sembler un peu fades par rapport à « Aventure en jaune » (l'album qui a vu naître le personnage), la richesse du thème et l'enthousiasme manifeste des auteurs donnent bon espoir pour la suite.

Michaël Bareyt
( Mis en ligne le 16/10/2007 )
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