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Bande dessinéeet Aventure  

Helldorado (vol.2) - Esperar la muerte
de Jean-David Morvan , Miroslav Dragan et Ignacio Noé
Casterman - Ligne d'Horizon 2007 /  9.80 €- 64.19  ffr. / 48 pages
ISBN : 9782203393110
FORMAT : 22,6x30,3 cm

Un enfer tropical ?

Le XVIIe siècle, les Amériques, Los Penitentes, une petite île perdue et sa population – les Syyanas – accueillante. Un cadre idyllique en somme, et pour les conquistadors, un avant-goût du paradis… Mais dans ce jardin d’Eden, le mal a fait son œuvre : une maladie mortelle et extrêmement contagieuse ronge la tribu, et menace bientôt les Européens. La solution : transformer l’île en un champ clos d’expérimentations médicales en tout genre (la version hispanique de Mengele), et le lieu d’un conflit entre deux civilisations antithétiques. Un premier album, « Santa Maladria », installait le récit dans un décor paradisiaque. Avec ce second tome, la réalité refait surface, impitoyablement : au fanatisme homicide des conquistadors, qui inventent, bien avant l’heure, la mort industrielle répond l’inflexible dureté du chef des Syyanas, le grand prêtre Pavo-Caltan, prêt à tout sacrifier au pouvoir. Et entre les deux, Initsii, princesse des Syyanas, cherche à survivre en assumant son rôle de princesse, tandis que Hutatsu, seul rescapé de la razzia effectuée par les conquistadors, espère encore sauver son ami Dathcino, prisonnier des étrangers et de leurs tristes desseins. Et le paradis de se transformer en un enfer pour nos trois héros…

L’histoire est sombre, très sombre : la mort plane constamment sur cet album, tant du fait de l’épidémie que de la violence des hommes et de leur fanatisme… On croirait une version dessinée d’Apocalypto, avec les diables blancs en contrepoint. Et le tout dans un décor de rêve, ciel bleu et forêt tropicale, avec une civilisation du genre maya, à la fois raffinée et impitoyable… Une belle fresque dans un univers peu visité par les auteurs de bande dessinée, et sur un thème (les conquistadors) également peu traité. Il y a là une dénonciation efficace du colonialisme et du fanatisme en général, comme un huis clos sur une île qui risque d’être bientôt déserte… Ignacio Noé, le dessinateur, livre un deuxième tome très réussi : le graphisme est bluffant, à la manière d’un Corben, d’un réalisme soigné et doux, qui alterne les paysages et les hommes, souligne les visages et sait ne pas reculer devant la peur ou la souffrance exprimée. Servi par un travail efficace des couleurs, et un jeu autour des ombres, de la lumière et du sépia, il offre au scénario de Morvan et Dragan une mise en image des plus réussies. Bref, un bel album, plutôt désespérant qui voit la folie triompher : il faut espérer un vrai rayon de soleil dans le prochain tome…

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 13/11/2007 )
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