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L’Orgue de Barbarie
de Nicolas de Crécy et Raphaël Meltz
Futuropolis 2007 /  21 €- 137.55  ffr. / 80 pages
ISBN : 978-2-7548-0063-1
FORMAT : 21x30 cm

Pré-making of

Les plus attentifs auront repéré dans la Monographie consacrée à Nicolas de Crécy (Éditions de l’An 2, 2003) quelques illustrations et croquis faisant référence à un film a priori « en production », L’Orgue de Barbarie. Les dessins, beaux comme du de Crécy, dataient en fait de 1999.
Huit ans plus tard, et après différentes tentatives de plans de financement, le film n’est toujours pas sorti, à peine aurait-il aujourd’hui, ô joie, trouvé un producteur. Ce livre, plutôt atypique, comme un produit dérivé avant l’heure, se présente donc comme un recueil de dessins et de recherches exécutés par de Crécy pour le film, accompagnant le synopsis complet (écrit en collaboration avec Raphaël Meltz avec qui de Crécy avait conduit son Voyage imaginaire à Lisbonne), livré tel quel, sans dialogues ni trompette.

On fait ainsi la connaissance de Steve Glarous et de son père, Gustave. Ce dernier, doux rêveur ambitieux a l’idée de se lancer dans le commerce, à l’échelle mondiale, de fruits et légumes. Pour une miette de pain, il fait ce qu’il croit être une affaire formidable : une petite échoppe délabrée, perdue au milieu de rien, loin de la grande ville. L’entreprise familiale commence plus que doucement, et propose de drôles d’idées commerciales : le raisin est à l’unité et la pastèque se vend par lot de trois. Dans le même temps, on croise le chemin du Truand et de son bras droit Maurice. Le destin de ces personnages va être bouleversé lorsque Gustave découvre dans un recoin de sa boutique une étrange machine, une orgue de Barbarie qui une fois utilisée donne à voir la réalité comme un long rêve idéal et idyllique.

On aurait évidemment préféré découvrir cette drôle d’histoire directement sur grand écran plutôt que d’en lire ici la description forcément un peu plate ; le lecteur pourra finalement choisir d’en faire l’impasse, préservant ainsi les effets de surprise. Le livre ne doit pas se lire mais se regarder, s’admirer, l’intérêt étant évidemment dans les dessins présentés ici, soignés et riches (on imagine l’auteur préparant ainsi son dossier à présenter aux financiers…) souvent en pleine page façon grand écran et permettant de découvrir quelques nouveaux jolis tableaux.

Les amateurs ne seront pas dépaysés. Ils reconnaîtront dans ces larges rues qu’arpentent les héros quelques quartiers ressemblant à ceux de New York sur Loire, fief bien connu des héros de de Crécy depuis Monsieur Fruit. Le goût prononcé de l’auteur pour le difforme, pour le gros, ou l’atrophié est aussi de la partie : ainsi le personnage du Truand, bibendum terrestre aux petits bras, Bénédicte, la donzelle gironde, ou le père Glarous, petit machin nerveux qui agite ses longs bras par-ci par là. L’ensemble regorge de coins rouillés, de tuyauteries tordues, de vieux tapis poussiéreux, de couleurs jaunes terreuses, rouges carmins ou vertes pas mûres, de papiers peints défraîchis et de carrelages vieillots. On est là en terrain connu, à la univers fois familier et qui donne l’envie au lecteur d’en voir plus.

Nicolas de Crécy déclarait vouloir travailler son film en utilisant alternativement les deux techniques d’animation que sont la 2D et la 3D. La première pour représenter l’univers « réel » des héros, et la seconde qui viendrait montrer les visions oniriques lorsque les personnages chaussent les lunettes de l’orgue. Ce livre ne laisse entrevoir que les passages traditionnels, laissant le rendu de cette troisième dimension encore mystérieuse, comme un clou du spectacle annoncé. Une raison de plus pour attendre ce film avec une vive impatience.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 18/12/2007 )
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