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Bande dessinéeet Adaptation  

Le Cavalier suédois
de Leo Perutz et Jean Pierre Mourey
Les Impressions nouvelles 2013 /  20 €- 131  ffr. / 141 pages
ISBN : 978-2-87449-166-5
FORMAT : 20x24 cm

Bergman en BD

Le Cavalier suédois est un grand roman de Léo Perutz, un classique, publié en 1936, dans lequel l’auteur autrichien imagine le destin de deux hommes, un gentilhomme suédois égaré dans une Prusse en guerre, et un vagabond fuyant « l’enfer de l’évêque », une version cléricale des travaux forcés. Entre ces deux hommes, point de liens, si ce n’est le hasard d’une rencontre et le mensonge du vagabond, qui parvient à se faire passer pour le gentilhomme en envoyant ce dernier le remplacer dans le fameux enfer épiscopal. Armé, nanti d’une nouvelle vie, le vagabond entreprend déjà de s’enrichir et de se venger de la société, en formant une bande de brigands, les Brigands de Dieu, qui dépouillent les églises, traqués par le Baron Maléfice. Mais c’est surtout l’amour qui le motive, celui d’une jeune noble polonaise qui croit retrouver son cousin suédois, puis l’amour de sa fille, qui ensorcelle ce père héroïque et mystérieux. Une fable sur le destin donc, mais à la manière de Perutz, c’est à dire avec une touche de fantastique, un romantisme froid, et autant de réflexions autour de la foi et de la religion, du destin, de l’amour et de la haine, etc. Quand le vagabond vit la vie du gentilhomme, assouvit des vengeances et y découvre l’amour, le gentilhomme connaît lui l’épreuve… mais chacun sera finalement rattrapé par son destin, qui veille sous l’apparence d’un meunier fantôme.

Un roman au charme un peu suranné, mais à l’ambiance étrange, une version gothique des romans de capes et d’épées… Sur cette base, Jean-Pierre Mourey (L’Invention de Morel, Casterman) livre un album très enlevé, parfaitement maîtrisé, séduisant en ce qu’il respecte l’ambiance et le style Perutz : décors épurés, graphisme aux allures d’eau-forte, personnages aux traits comme taillés au burin, et avec ça, une atmosphère étrange soulignée par l’usage de la bichromie. Des ciels gris, des plaines blanches, un univers doré traversé par des spectres, des anges et des brigands, où seul l’amour est un point d’ancrage. Le graphisme, sobre et soigné, concourt à renforcer l’impression d’étrangeté du texte et confère à cet album, très réussi, le charme d’une rencontre, à travers les âges entre l’auteur autrichien et le dessinateur. Un album singulier au service d’un roman qui ne l’est pas moins, une magnifique transposition.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/09/2013 )
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