L'actualité du livre
Bande dessinéeet Humour  

La Battemobile - Et autres aventures de Batteman
de Pochep
Onapratut 2010 /  14 €- 91.7  ffr. / 128 pages
ISBN : 978-2-9525620-96
FORMAT : 24x17 cm

Super zéro

Cela commence par un gag d’anthologie, deux cases dignes de figurer au panthéon des gags à deux cases. Puis cela continue sur la même lignée, une paire de strips par page et ce sur plus de cent pages. Faites-le compte, il y a là de quoi se marrer pendant un bon bout de temps. Car avec La Battemobile, Pochep signe à la fois la meilleure parodie de super-héros depuis longtemps (Larcenet ? Gotlib ? Mad ?...), et la bande dessinée la plus drôle du moment.

Batteman et son associé Robine sont donc les justiciers qui veillent sur la tranquillité de Gottame City. Sauf que ce sont de sacrés nigauds embarqués dans une Battemobile qui ne fonctionne plus, et rapidement sujets à une série d’imbroglios et de quiproquos incroyables. C’est en effet au détour d’un strip anodin, lorsque Batteman prête son costume à Madame Lulu, que tout va prendre une tournure extravagante et inextricable.

De l’art de faire sérieusement de l’humour. L’auteur connaît son strip sur le bout des crayons et sait parfaitement doser silences, accélérations et comique de répétition sans jamais pour autant sonner faux ou tomber à côté. Et surtout, dans ce qui semble être une gigantesque improvisation, il arrive à donner une cohérence et une logique (terrible jeu de dominos pour ce pauvre Batteman), à tout cette sale histoire.
L’humour de Pochep réside ici dans des situations loufoques qui ne semblent étonner personne d’autre que le lecteur. L’absurde n’encombre pas le côté tout simplement con des personnages : on assiste là à un défilé d’âneries projetées à la vitesse du son, laissant muet jusqu’au personnage principal. Pauvre Batteman qui, au bout d’un moment, complètement dépassé, finira en effet par ne plus rien dire, juste être le témoin d’un absurde et fâcheux malentendu. Le personnage en devient presque touchant, alors qu’autour de lui s’agite une foule de caractères abrutis. On nage en pleine dégénérescence : sitcoms débiles, punks anarchistes idiots, avocat crétin et véreux, jeune flic propret dévoyé par une prostituée professionnelle… L’ensemble est joyeusement grotesque… et terriblement efficace.

Le dessin de Pochep est aussi extra : au premier abord d’une grande simplicité, naïf voire pataud, et pourtant chaque case, chaque geste, chaque expression sont finement travaillés, sans artifice, sans en faire des tonnes mais avec facilité, aisance et une grande justesse. On est dans l’économie de moyens, celle imposée traditionnellement par le strip à l’américaine, lorsqu’il faut faire vite et bien : traits de contour clairs et précis, noir et blanc, pas ou peu de décor. Cela pourrait tomber dans l’ennuyeux si l’ensemble n’était pas plongé dans un grand bain délirant.

C’est parfois drôle certes, mais c’est donc le plus souvent hilarant. Et Pochep est assurément un auteur à suivre, car un rigolo comme ça, on n’en lit plus tous les jours. Il faut d’ailleurs aussi se ruer sur le blog du monsieur, site régulièrement mis à jour avec des ribambelles de dessins extras sortis de l’imagination d’un forcené du gag qui prouve que l’humour dans la bande dessinée n’a pas encore dit ses dernières blagues.

Les éditions Onapratut s’enrichissent donc d’un réjouissant album, présenté dans un chouette format à l’italienne, et qui ne lâchera son lecteur qu’au bout d’une foultitude de fous-rires.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 29/11/2010 )
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