L'actualité du livre
Bande dessinéeet Humour  

Georges Frog (tome 2) - Rent party
de Phicil et Drac
Carabas - Igloo 2007 /  9.95 €- 65.17  ffr. / 48 pages
ISBN : 978-2-35100-224-7
FORMAT : 22x29,5 cm

Little Street Blues

Avec ses personnages issus d’un dessin animé et son univers immédiatement familier, Georges Frog a les allures d’un classique - un standard - que l’on découvrirait seulement maintenant après pourtant en avoir longtemps entendu parler.

À la fin du précédent tome, et après plusieurs mois de galère à composer seul dans son appartement, Georges Rainette (Frog pour les futures planches de l’Apollo Theater) était contacté par le producteur de Pigty Records. On retrouve donc ici la grenouille pianiste joliment endimanchée et prête à signer un gros contrat ; le deal qui fera d’elle la nouvelle star de la scène new-yorkaise, le plus grand entertainer des Etats-Unis. Sauf que, le monde de l’argent supportant mal les coquetteries et autres vicissitudes artistiques, Georges est sommé de rendre sa musique un peu plus commerciale, et « d’éclaircir par-ci par-là » des chansons encore sans doute trop authentiques pour être rentables. Mais la petite grenouille a du caractère et son contrat voilà ce qu’elle en fait… Retour à la case départ donc, c’est-à-dire dans le petit appartement de Little Street, sans Big Band, entre un piano qui parle et des voisins sympas. Et un peu plus de blues dans la tête, d’autant que Cora, la jolie jeune chatte autrefois amoureuse a bel et bien disparu de la circulation, laissant un Frog bien triste… et sans le sou. Et ça n’est pas en donnant des cours de musique payés en carottes à la timide Rose que les affaires vont aller mieux. Bref, la vie n’est pas facile pour un jeune pianiste de jazz en cette fin des années 30…

Avec ce deuxième album de la série, Phicil confirme les qualités déjà présentes dans le précédent opus. En situant cette aventure dans un New York agréablement rétro et familièrement exotique, le lecteur est de suite plongé dans un univers séduisant et dans lequel il fait bon se promener. Tout cela sent bon le vieux disque écouté sur un gramophone, le swing, et l’impro. Avec un joli sens de la caractérisation, Phicil construit par petites touches un monde charmant et rempli de personnages attachants. Ainsi Georges, Kermit talentueux et angoissé, trop petit face à son piano trop grand, et dévoré par l’envie parfois naïve de vivre jusqu’au bout sa passion musicienne. Autour de lui, des personnages que l’on croise et recroise en bas de l’escalier, rendant chaleureusement sympathique cette ménagerie mélomane. La bande dessinée animalière a en effet cette force de rendre immédiatement crédibles les personnages les plus simples. Et si leurs patronymes respectifs les réduisent au simple nom de leur espèce (Duck Ellington, Georges Frog, Dog Joe...) comme auparavant Donald et Mickey, cela ne suffit pas à faire d’eux des caricatures ; voilà au contraire des caractères immédiatement signifiés et en même temps singuliers. Et lorsque les animaux envahissent ce New York d’Épinal, les lieux ainsi revisités trouvent un éclat tout particulier, d’autant qu’ils sont génialement croqués par un dessinateur inspiré et dont le coup de crayon laisse présager encore de grandes choses.

Agréablement secondé par Drac aux couleurs (palette élégante, chaude et jaunie par le temps), Phicil livre ici un très bel ouvrage, jolie et simple histoire d’un apprentissage artistique sans tambour mais avec quelques notes de trompette. Et un terrible solo de sax.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 27/06/2007 )
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